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DE 31. DE VOLTAIRE. 409

ressant dans l'histoire générale des mœurs et de l'esprit des nations, dont il s'est avisé de parler avec une si prodigieuse ignorance.

On m'a dit qu'il avait voulu intenter un procès aux ex-jésuites de Besançon, ses confrères, prétendant qu'ils ne lui avaient pas donné sa part complète de l'argent qu'ils partagèrent entre eux quand ils furent chassés de leur collège. C'est ce qui m'est encore fort indifférent.

C'est peut-être pour se dédommager qu'il a fait imprimer le livre de ses erreurs ; mais je ne crois pas que cet ouvrage ait fait sa fortune 1. Lisez-le si vous pouvez, vous ne trouverez pas une page qui ne vous fasse douter s'il y a plus d'ignorance que de sottises : et cependant il y a de la malice. Vous savez, monsieur, que c'est un vice qu'on reproche à ses confrères ; je n'entends pas ceux de la société de Jésus, mais ceux de la société de Mont- martre, qui ont une croix sur le dos^.

Son erreur opiniâtre sur la ville de Livron, dont vous parlez, et sur la confession des laïques, n'est rien en comparaison des autres. Le pauvre homme ne sait pas seulement que saint Basile, dans ses Règles abrégées, interrog. 110, tome II, page /i53, -permet a l'abbesse d'entendre avec les prêtres les confessions de ses religieuses ; il ne sait pas que le P. Martennes, bénédictin très-savant, a prouvé, dans ses Rites de l'Église, tome -II, page 39, que les abhesses confes- saient autrefois leurs nonnes, et qu'elles étaient si curieuses qu'on leur ôta ce droit.

Il ne sait pas que son confrère DanicP, dans sa mauvaise histoire de France, est obligé d'avouer que les rois de la pre- mière race avaient à la fois plusieurs femmes.

Il ne sait pas que le martyre de la légion thébaine^, sur la- quelle il est revenu deux ou trois fois, est une fable absurde, dont Grégoire de Tours est le premier inventeur.

Il ne sait pas que des moines attribuèrent ensuite ce conte à un évêque de Lyon, nommé Eucherius, mort en k5k.

Il ne sait pas que, dans cette légende, qu'on suppose écrite

1. Quand il cul fait imprimer ce beau livre, dans Avignon, chez le libraire Fez, il me fit proposer, par ce Fez, de me vendre toute l'édition pour mille cous. Je conserve sa lettre en original ; mais comme je ne vends point mes ouvrages, quoi qu'en disent des gredins comme Patouillet et Nonotte; comme je ne souffre pas même que mes laquais en retirent le moindre émolument, je n'achète pas non plus les productions des Nonottes. {Note de Voltaire.)

2. C'est-à-dire les ânes.

3. Voyez tome XXIV, page 489.

4. Voyez tome XXIV, page 487; et XXVI, 142.

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