Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome27.djvu/371

Cette page n’a pas encore été corrigée

L'A, B, C. 363

A.

Je ne demande pas aussi qu'on insulte la société, mais qu'on réclaire. Si la religion du pays est divine (car c'est de quoi chaque nation se pique), cent mille volumes lancés contre elle ne lui feront pas plus de mal que cent mille pelotes de neige n'ébran- leront des murailles d'airain. Les portes de l'enfer ne prévau- dront pas contre elle S comme vous savez : comment des carac- tères noirs tracés sur du papier blanc pourraient-ils la détruire?

Mais si des fanatiques, ou des fripons, ou des gens qui pos- sèdent ces deux qualités à la fois, viennent à corrompre une religion pure et simple; si par hasard des mages et des bonzes ajoutent des cérémonies ridicules à des lois sacrées, des mystères impertinents à la morale divine des Zoroastre et des Confutzée, le genre humain ne doit-il pas des grâces à ceux qui nettoie- raient le temple de Dieu des ordures que ces malheureux y au- ront amassées ?

B.

Vous me paraissez bien savant: quels sont donc ces préceptes de Zoroastre et de Confutzée?

A.

Confutzée ne dit point : « Ne fais pas aux hommes ce que tu ne voudrais pas qu'on te fît. »

Il dit: « Fais ce que tu veux qu'on te fasse; oublie les injures, et ne te souviens que des bienfaits. » Il fait un devoir de l'amitié et de l'humanité.

Je ne citerai qu'une seule loi de Zoroastre, qui comprend ce que la morale a de plus épuré, et qui est justement le contraire du fameux probabilisme des jésuites : « Quand tu seras en doute si une action est bonne ou mauvaise, abstiens-toi de la faire-.»

Nul moraliste, nul philosophe, nul législateur n'a jamais rien dit ni pu dire qui l'emporte sur cette maxime. Si, après cela, des docteurs persans ou chinois ont ajouté à l'adoration d'un Dieu et à la doctrine de la vertu des chimères fantastiques, des appa- ritions, des visions, des prédictions, des prodiges, des posses- sions, des scapulaires; s'ils ont voulu qu'on ne mangeât que de certains aliments en l'honneur de Zoroastre et de Confutzée ; s'ils ont prétendu être instruits de tous les secrets de la famille de ces deux grands hommes; s'ils ont disputé trois cents ans pour

1. Matth., XVI, 18.

2. Voyez, tome XXI. la note de la page 570.

�� �