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L'A, B, C. 34.>

nommé Cyriis, OU Romiilus, assassin de son frère, ou Clovis, autre assassin, Genseric, Attila, se font rois : les peuples qui demeurent dans des cavernes, dans des îles, dans des marais, dans des gorges de montagnes, dans des rochers, conservent leur liberté, comme les Suisses, les Grisons, les Vénitiens, les Génois. Ou vit autrefois les Tyriens, les Carthaginois et les Rliodiens, conserver la leur tant qu'on ne put aborder chez eux par mer. Les Grecs furent longtemps libres dans un pays hérissé de montagnes; les Romains dans leurs sept collines reprirent leur liberté dès qu'ils le purent, et l'ôtèrent ensuite à plusieurs peuples en les surprenant, en les tuant, et en les volant, comme nous l'avons déjà dit^. Et enfin la terre appartint partout au plus fort et au plus habile.

A mesure que les esprits se sont raffinés, on a traité les gou- vernements comme les étoffes dans lesquelles on a varié les fonds, les dessins et les couleurs. Ainsi la monarchie d'Espagne est aussi différente de celle d'Angleterre que le climat. Celle de Pologne ne ressemble en rien à celle d'Angleterre. La république de Venise est le contraire de celle de Hollande.

C.

Tout cela est palpable; mais, parmi tant de formes de gou- vernement, est-il bien vrai qu'il y ait jamais eu une théocratie?

A. Cela est si vrai que la théocratie est encore partout, et que du Japon à Rome on vous montre des lois émanées de Dieu même.

B. Mais ces lois sont toutes différentes, toutes se combattent. La raison humaine peut très-bien ne pas comprendre que Dieu soit descendu sur la terre pour ordonner le pour et le contre, pour commander aux Égyptiens et aux Juifs de ne jamais manger de cochon après s'être coupé le prépuce, et pour nous laisser à nous des prépuces et du porc frais. Il n'a pu défendre l'anguille et le lièvre en Palestine, en permettant le lièvre en Angleterre, et en ordonnant l'anguille aux papistes les jours maigres. J'avoue que je tremble d'examiner; je crains de trouver là des contradictions.

A. Bon lies médecins n'ordonnent-ils pas des remèdes contraires dans les mêmes maladies? L'un vous ordonne le bain froid, l'autre le bain chaud; celui-ci vous saigne, celui-là vous purge,

l. Voyez tome XI, page 140.

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