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L'A, B. C. 319

galons et les étoffes de l'étranger, et que les Hollandais ne pou- vaient acheter de la cannelle. Ce qui était très-raisonnable en Espagne eût été très-ridicule en Hollande.

1 Si un roi donnait sa voix dans les jugements criminels, « il perdrait le plus bel attribut de sa souveraineté, qui est celui de faire grâce. H serait insensé qu'il fît et défît ses jugements. H ne voudrait pas être en contradiction avec lui-même. Outre que cela confondrait toutes les idées, on ne saurait si un homme serait absous ou s'il recevrait sa grâce ».

Tout cela est évidemment erroné. Qui empêcherait le sou- verain de faire grâce après avoir été lui-même au nombre des juges ? Comment est-on en contradiction avec soi-même, en jugeant selon la loi, et en pardonnant selon sa clémence? En quoi les idées seraient-elles confondues ? Comment pourrait-on ignorer que le roi lui a publiquement fait grâce après la condam- nation ?

Dans le procès fait au duc d'Alençon^, pair de France, en U58, le parlement, consulté par le roi pour savoir s'il avait le droit d'assister au jugement du procès d'un pair de France, répondit qu'il avait trouvé par ses registres que non-seulement les rois de France avaient ce droit, mais qu'il était nécessaire qu'ils y assis- tassent en qualité de premiers pairs.

Cet usage s'est conservé en Angleterre. Les rois d'Angleterre délèguent à leur place, dans ces occasions, un grand steward qui les représente. L'empereur peut assister au jugement d'un prince de l'empire. H est beaucoup mieux sans doute qu'un souverain n assiste point aux jugements criminels : les hommes sont trop faibles et trop lâches ; l'haleine seule du prince ferait trop pencher la balance.

« 2 Les Anglais, pour favoriser la liberté, ont ôté toutes les puissances intermédiaires qui formaient leur monarchie. »

Le contraire est d'une vérité reconnue. Hs ont fait de la chambre des communes une puissance intermédiaire qui balance celle des pairs. Ils n'ont fait que saper la puissance ecclésiastique, qui doit être une société priante, édifiante, exhortante, et non pas puissante.

u * n ne suffit pas qu'il y ait, dans une monarchie, des rangs intermédiaires ; il faut encore un dépôt de lois... L'ignorance naturelle à la noblesse, son inattention, son mépris pour le

��\. Liv. VI, ch. V. {Note de Voltaire.) 3. Liv. II, ch. iv. {Note de Voltaire.) 2. Voyez tome XV, page 469. 4. Ibid. {Id.)

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