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De la tour de Babel vous irez à Ur en Chaldée, et vous demanderez aux descendants d’Abraham le potier pourquoi il quitta ce beau pays pour aller acheter un tombeau à Hébron, et du blé à Memphis; pourquoi il donna deux fois sa femme pour sa sœur; ce qu’il gagna au juste à ce manège. Sachez surtout de quel fard elle se servait pour paraître belle à l’âge de quatre-vingt-dix ans. Sachez si elle employait l’eau rose ou l’eau de lavande pour ne pas sentir le gousset quand elle arriva à pied, ou sur son âne, à la cour du roi d’Egypte et à celle du roi de Gérare, car toutes ces choses sont nécessaires à salut.

Vous savez que le Seigneur fit un pacte ^ avec Abraham, par lequel il lui donna tout le pays depuis le fleuve d’Egypte jusqu’à l'Euphrate. Sachez bien précisément pourquoi ce pacte n’a pas été exécuté.

X. — Chemin faisant vous irez à Sodome. Demandez des nouvelles des deux anges qui vinrent voir Loth, et auxquels il prépara un bon souper. Sachez quel âge ils avaient quand les Sodomites voulurent leur faire des sottises, et si les deux filles de Loth étaient pucelles lorsque le bonhomme Loth pria les Sodomites de coucher avec ses deux filles, au lieu de coucher avec ces deux anges. Toute cette histoire est encore très-nécessaire à salut. De Sodome vous irez à Gabaa, et vous vous informerez du nom du lévite auquel les bons Benjamites firent la même civilité que les Sodomites avaient faite aux auges.

XI — Quand vous serez en Egypte, informez-vous d’où venait la cavalerie que le pharaon envoya dans la mer Rouge à la poursuite des Hébreux: car tous les animaux ayant péri dans la sixième et septième plaie, les impies prétendent que le pharaon n’avait plus de cavalerie. Relisez les Mille et une Nuits, et tout l'Exode, dont Hérodote, Thucydide, Xénophon, Polybe, Tite-Live, font une mention si particulière, ainsi que tous les auteurs égyptiens.

XII. — Nous ne vous parlons pas des exploits de Josué, successeur de Mosé, et de la lune qui s’arrêta sur Aïalon en plein midi, quand le soleil s’arrêta sur Gabaon : ce sont de ces choses qui arrivent tous les jours, et qui ne méritent qu’une légère attention.

Mais ce qui est très-utile pour la morale, et qui doit infiniment contribuer à rendre nos mœurs plus honnêtes et plus douces, c’est l’histoire des rois juifs. Il faut absolument supputer combien ils commirent d’assassinats. Il y a des Pères de l’Église qui en

1. Genèse, ch. xv, v. 18. (Note de Voltaire.)