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226 LES COLIMAÇONS.

trouTerez au psaume xcvi que les montagnes ont fondu comme (le la cire. Vous trouverez aussi au psaume ex m qu'elles ont dansé comme des Léliers. Or si, étantfondues, psaume xcvi, elles ont dansé, psaume cxiii, il faut donc qu'elles se soient entière- ment relevées dans l'espace de dix-sept psaumes. Cela est démontré en rigueur.

Vous savez que la théorie des montagnes fait une grande partie de notre théologie, surtout quand elles sont plantées de vignes. ÎNous avons été fondés sur le mont Carmel; mandez-moi s'il est vrai que vous l'ayez été à Montmartre. Adieu; que les colimaçons qui vous sont soumis, et tous les insectes qui vous accompagnent, hénissent toujours Votre Révérence.

RÉFLEXION DE L'ÉDITEUR.

Quoi qu'il en soit de tout cela, il est induhitable que les lima- çons à coque, les escargots, commencent à reprendre une tête quelque temps après qu'on la leur a coupée. Cette nouvelle tête renferme tout l'appareil d'organes très-compliqués que renfermait la première. Il n'y a point de petit garçon qui ne puisse faire cette expérience; mais y a-t-il quelque homme fait qui puisse l'expli- quer? Hélas! les philosophes et les théologiens raisonnent tous en petits garçons. Qui me dira comment une âme, un principe de sensation et d'idées réside entre quatre cornes, et comment l'àme restera dans l'animal quand les quatre cornes et la tête sont cou- pées? On ne peut guère dire d'un limaçon:

Igncus est illi vigor et cœlestis origo.

(ViRG., .£)!., YI, ■730.)

Il serait difficile de prouver que l'àme d'un animal qui n'est qu'une glaire en vie soit un feu céleste. Enfin ce prodige d'une tête re- naissante, inconnu depuis le commencement des choses jusqu'à nous, est plus inexplicable que la direction de l'aimant. Cet éton- nant objet de notre curiosité confondue tient à la nature des choses, aux premiers principes, qui ne sont pas plus à notre portée que la nature des habitants de Sirius et de Canope. Pour peu qu'on creuse, on trouve un abîme infini. Il faut admirer et se taire.

FIN DES COLI.M ACOXS.

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