Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome27.djvu/168

Cette page n’a pas encore été corrigée

160 CHAPITRE XX.

répètent de fausses nouvelles insérées dans les gazettes, lors même qu'elles ont été rétractées. Un nouvel auteur^ d'une traduction élégante et exacte de Lucrèce, enrichie de notes savantes, s'efTorce, dans les notes du troisième livre, de combattre Lucrèce même à l'appui des malheureuses expériences de Needham, si bien con- vaincues de fausseté par M. Spallanzani, et rejetées de quiconque a un peu étudié la nature-. L'ancienne erreur que la corruption est mère de la génération ^ allait ressusciter; il n'y avait plus de germe S et ce que Lucrèce, avec toute l'antiquité, jugeait impos- sible, allait s'accomplir.

Ex omnibu' rébus'

Omne genus nasci posset, nil semine egerel. E mare prinium homines, e terra posset oriri Squammigerum genus, et volucres; erumpere cœlo

Armenta atque alise pecudes

Ferre omnes omnia possent.

Le hasard incertain de tout alors dispose, L'animal est sans germe, et l'effet est sans cause. On verra les humains sortir du fond des mers, Les troupeaux bondissants tomber du haut des airs; Les poissons dans les bois naissant sur la verdure : Tout pourra tout produire, il n'est plus de nature.

��1. Lagrange; voyez tome XVIII, page 374.

2. Voyez l'ouvrage intitulé ]\'ouvelles Uecherches sur les animaux microsco- piques, par M. Spallanzani. Il avait sur Noedhani un grand avantage, celui de n'avoir les yeux fascinés par aucun système physique ou tiléologique. Tuberville Keedham était Anglais et prêtre, et non Irlandais et jésuite; c'est une plaisanterie. Les expériences microscopiques lui avaient donné quelque réputation, mais la métaphysique de collège, dans laquelle il noya ses observations, le fit tomber; il eut le malheur d'obliger M. de Voltaire à écrire contre lui, et il devint ridicule. Les animaux microscopiques observés par Xeedham sont de vrais animaux, comme l'a prouvé M. Spallanzani. Parmi les prétendues anguilles, il y en a do réelles: ce sont celles d'une espèce de blé vicié ; elles ont la singulière propriété de vivre étant desséchées, et de se ranimer lorsqu'on les mouille avec un peu d'eau. Cette propriété se conserve durant un temps indéfini ; mais ces animaux existent dans le grain même, après avoir vécu dans la racine et dans la tige; il n'y a point là de génération spontanée. Quelques autres des anguilles de Needham sont des fila- ments ou des gaines dans lesquelles les vrais animaux sont renfermés.

M. Spallanzani a monti'é que Xeedham n'avait pas pris toutes les précautions nécessaires pour détruire les germes qui auraient pu se développer dans les infu- sions, et que, quand on prend ces précautions, on ne trouve plus d'animaux. (K.)

3. Aux Corinthiens, xv, 36.

4. Ce qui suit, jusqu'au mot poule, a été ajouté d'après le manuscrit dont il est parlé dans la note 5 de la page précédente.

5. Lucrèce: De rerum Natura,!, 160-07.

�� �