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IDÉES DE PALISSV SUR LES COQUILLES. r-ïi

par une légère âcreté : c'est un effet que les coquilles ne produi- ront pas. Il est indubitable que le falun est une terre calcaire et marneuse; il est indubitable aussi qu'elle renferme quelques coquilles de moules à dix, à quinze pieds de profondeur. L'auteur estimable de VHistoire naturelle, aussi profond dans ses vues qu'at- trayant par son style, dit expressément : « Je prétends que les coquilles sont l'intermède que la nature emploie pour former la plupart des pierres. Je prétends que les craies, les marnes, et les pierres à cliaux, ne sont composées que de poussière et de détri- ments de coquilles. »

On peut aller trop loin, quelque habile physicien que l'on soit. J'avoue que j'ai examiné pendant douze ans de suite la pierre à chaux que j'ai employée, et que ni moi ni aucun des assistants n'y avons aperçu le moindre vestige de coquilles.

x\-t-on donc besoin de toutes ces suppositions pour prouver les révolutions que notre globe a essuyées dans des temps prodi- gieusement reculés? Quand la mer n'aurait abandonné et couvert tour à tour les terrains Ijas de ses rivages que le long de deux mille lieues sur quarante de large dans les terres, ce serait un changement sur la surface du globe de quatre-vingt mille lieues carrées.

Les éruptions des volcans, les tremblements, les affaissements des terrains, doivent avoir bouleversé une assez grande quantité delà surface du globe ; des lacs, des rivières, ont disparu, des villes ont été englouties, des îles se sont formées, des terres ont été séparées : les mers intérieures ont pu opérer des révolutions beaucoup plus considérables. N'en voilà-t-il pas assez ? Si l'ima- gination aime à se représenter ces grandes vicissitudes de la nature, elle doit être contente.

^ J'avoue encore qu'il est démontré aux yeux qu'il a fallu une prodigieuse multitude de siècles pour opérer toutes les révolu- tions arrivées dans ce globe, et dont nous avons des témoignages incontestables. Les quatre cent soixante et dix mille ans dont les Babyloniens, précepteurs des Égyptiens, se vantaient, ne suffisent peut-être pas; mais je neveux point contredire la Ge- nèse, que je regarde avec vénération. Je suis partagé entre ma faible raison, qui est mon seul flambeau, et les livres sacrés juifs, auxquels je n'entends rien du tout. Je me borne toujours à prier Dieu que des hommes ne persécutent pas des hommes ;

��\. Cet alinéa n'est point dans les éditions de 17(18; il fut ajoute en 177 i, t. XXII, in-4\ (B.)

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