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118 CHAPITRE XIV.

vient ; et je doute qu'elle puisse servir de fondement à un système de l'univers.

Je ne nie pas, encore une fois, qu'on ne rencontre à cent milles de la mer quelques huîtres pétrifiées, des conques, des univalves, des productions qui ressemblent parfaitement aux pro- ductions marines ; mais est-on bien sûr que le sol de la terre ne peut enfanter ces fossiles? La formation des agates arborisées ou lierborisées ne doit-elle pas nous faire suspendre notre juge- ment? Un arbre n'a point produit l'agate qui représente parfai- tement un arbre ; la mer peut aussi n'avoir point produit ces coquilles fossiles qui ressemblent à des habitations de petits ani- maux marins. L'expérience suivante en peut rendre témoignage.

��CHAPITRE XIV^

OBSERVATION IMPORTANTE SIR LA FORMATION DES PIERRES ET DES COQIILLAGES.

M, Le Royer de La Sauvagère ^ ingénieur en chef, et de l'A- cadémie des belles-lettres de la Rochelle, seigneur de la terre Desplaces en Touraine, auprès de Chinon, atteste qu'auprès de son château une partie du sol s'est métamorphosée deux fois en un lit de pierre tendre dans l'espace de quatre-vingts ans^ Il a été témoin lui-même de ce changement. Tous ses vassaux et tous ses voisins l'ont vu. Il a bâti avec cette pierre, qui est devenue très-dure étant employée. La petite carrière dont on l'a tirée commence à se former de nouveau. Il y renaît des coquilles qui d'abord ne se distinguent qu'avec un microscope, et qui crois- sent avec la pierre. Ces coquilles sont de différentes espèces : il y a des ostracites, des gryphites, qui ne se trouvent dans aucune de nos mers ; des cames, des télines, des cœurs, dont les germes se développent insensiblement, et s'étendent jusqu'à six lignes d'épaisseur.

\. Dans les cditions de Kehl, ce chapitre xiv n'était que dans VErratum, comme devant, avec les deux qui précèdent et les quatre qui suivent, former l'article Coquilles du Dictionnaire philosophique iYoyez tome XVIII, page 269.

2. Félix-François Le Royer d'Artezet de La Sauvagère, né en Touraine le octobre 1707, mort en 1781, est auteur de quelques dissertations sur l'histoire

naturelle et les antiquités. Voltaire, qui était en correspondance avec lui (voyez les années 1764,1770, 1777), lui envoya un exemplaire des Sinoidarités de lanature.

3. Ceci est difficile à admettre en ces termes : peut-être une eau calcaire a pu déposer et donner un certain volume de carbonate de chaux. (D.)

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