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il2 REMONTRANCES

des écuries de Constance Chlore, qui mit la religion chrétienne sur le trône de Constantin son bâtard; ce sont des reines qui ont rendu l'Angleterre, la Hongrie, la Russie, chrétiennes ^ Nous fûmes protégés par la duchesse de Ferrare, par la mère et la sœur du grand Henri IV. Nous avons toujours besoin de dévotes; ne les aliénez pas de nous. Si les femmes nous abandonnent, nous sommes perdus.

Loin que la Suisse, Genève, la basse Allemagne, l'Angleterre, renoncent, comme vous le prétendez, au christianisme, tous ces pays, devenus plus éclairés, demandent un christianisme plus pur, Les laïques sont instruits, et trop instruits aujourd'hui pour les prêtres. Les laïques savent que la décision du premier concile de Nicée fut faite contre le vœu unanime de dix-sept évêques et de deux mille prêtres. Hs croient qu'il est impossible que deux per- sonnes soient la même chose ; ils croient qu'un homme ne peut pas avoir deux natures; ils croient que le péché originel fut in- venté par Augustin.

Hs se trompent sans doute ; mais ayons pour eux de l'indul- gence. Hs révèrent Jésus ; mais Jésus sage, modeste, et juste, qui jamais, disent-ils, n'a fait sa proie de s'égaler à Dieu; Jésus, qui jamais n'a dit avoir deux natures et deux volontés, le Jésus véri- table en un mot, et non pas le Jésus qu'ils prétendent défiguré dès les premiers temps, et encore plus dans les derniers.

On a fait une petite réforme au xvi^ siècle : on en demande partout une nouvelle à grands cris. Le zèle est peut-être trop fort; mais on veut adorer Dieu, et non les chimères des hommes.

Nous nous souviendrons toute notre vie d'un de nos confrères du Gévaudan : ce n'est pas de la bête^ dont nous voulons parler; c'est d'un pasteur qui faisait assez joliment des vers pour un homme qui n'avait jamais été à Paris. H nous dit quelques heures avant de rendre son àme à Dieu :

Amis, j'ai longtemps combattu Pour le fanatisme et la fable : Moins de dogme et plus de vertu, A'oilà le culte véritable.

Ces paroles se gravèrent dans tous nos cœurs. Hélas ! ce sont les disputes sur le dogme qui ont tout perdu. Ces seuls mots ^ :

1. Voyez tome XI, pages 329, 370.

2. Sur cette bête, voyez tome XXV, page 378.

3. Matthieu, xvi, 18.

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