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L'ÉPÎTRE

branle la tête, Simon Pierre invoque Jésus-Christ, et dit au mort de se lever ; le mort se lève, et vient l’embrasser. Ensuite vient l’histoire connue des deux chiens ; puis Abdias raconte comment Simon vola dans les airs, comment son rival Simon Pierre le fit tomber. Simon le Magicien se cassa les jambes, et Néron fit crucifier Simon Pierre la tête en bas pour avoir cassé les jambes de l’autre Simon.

Cette arlequinade a été écrite non-seulement par Abdias, mais encore par je ne sais quel Marcel et par un Hégésippe qu’Eusèbe cite souvent dans son histoire. Observez, judicieux Romains, je vous en conjure, comment ce Simon Pierre peut avoir régné spirituellement vingt-cinq ans dans votre ville. Il y vint sous Néron, selon les plus anciens écrivains de l’Église ; il y mourut sous Néron : et Néron ne régna que treize années.

Que dis-je ? lisez les Actes des apôtres ; y est-il seulement parlé d’un voyage de Pierre à Rome ? il n’en est pas fait la moindre mention. Ne voyez-vous pas que lorsque l’on imagina que Pierre était le premier des apôtres, on voulut supposer qu’il n’y avait eu que la ville impériale digne de sa présence ? Voyez avec quelle grossièreté on vous a trompés en tout : serait-il possible que le fils de Dieu, Dieu lui-même, n’eût employé qu’une équivoque de polisson, une pointe, un quolibet absurde[1], pour établir Simon Barjone chef de son Église : Tu es surnommé Pierre, et sur cette pierre j’établirai mon Église ? Si Barjone s’était appelé Potiron, Jésus lui aurait dit : Tu es Potiron, et Potiron sera appelé le roi des fruits de mon jardin.

Pendant plus de trois cents ans le successeur prétendu d’un paysan de Galilée fut ignoré dans Rome. Voyons enfin comment les papes devinrent vos maîtres.

HUITIÈME IMPOSTURE.

Il n’y a aucun homme instruit dans l’histoire des Églises grecque et latine qui ne sache que les siéges métropolitains établirent leurs principaux droits au concile de Chalcédoine, convoqué en 451 par l’ordre de l’empereur Marcien et de Pulchérie, composé de six cent trente évêques. Les sénateurs qui présidaient au nom de l’empereur avaient à leur droite les patriarches d’Alexandrie et de Jérusalem, et à leur gauche celui de Constantinople et les députés du patriarche de Rome. Ce fut par les canons

  1. Matthieu, xvi, 18.