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360 MÉMOIRE.

Comment peut-il être assez ignorant de tous les usages et de toutes les choses dont il parle pour dire qu'au temps de la révo- cation de redit de Nantes, « le roi étant à la promenade, en car- rosse, avec M™" de Maintenon, M"*^ d'Armagnac, et M. Fagon, son premier médecin, la conversation tomba sur les vexations faites aux huguenots, etc. » ? Assurément ni Louis XIV, ni Louis XV, n'ont été en carrosse à la promenade ni avec leur médecin, ni avec leur apothicaire. Fagon ne fut d'ailleurs premier médecin du roi qu'en 1693. A l'égard de la princesse d'Armagnac, dont il parle, elle était née en 1678, et, n'ayant alors que sept ans, elle ne pouvait aller familièrement en carrosse à une promenade avec le roi et Fagon en 1685.

C'est avec la même érudition de cour qu'il dit que le « P. Ferrier se fit donner la feuille des bénéfices, qu'avait auparavant le pre- mier valet de chambre » ; que l'archevêque de Paris dressa l'acte de célébration du mariage du roi avec M'"* de Maintenon, et qu'à sa mort on trouva sous la (( clef quantité de vieilles culottes, dans l'une desquelles était cet acte ».

Il connaît l'histoire antique comme la moderne; pour justifier le mariage du roi avec M'"^ de Maintenon, il dit que Gléopâtre, déjà vieille, enchaîna Auguste.

Chaque page est une absurdité ou une imposture. Il réclame le témoignage de Burnet, évêquede Salisbury, et lui fait dire joli- ment que Guillaume III, roi d'Angleterre, n'aimait que les portes de derrière. Jamais Burnet n'a dit cette infamie; il n'y a pas un seul mot dans aucun de ses ouvrages qui puisse y avoir le moindre rapport.

S'il se bornait à dire au hasard des absurdités sur des choses indifférentes, on aurait pu l'abandonner au mépris dont les au- teurs de pareilles indignités sont couverts; mais qu'il ose dire que monseigneur le duc de Bourgogne, père du roi, trahit le royaume, dont il était héritier, et qu'il .empêcha que Lille ne fût secourue lorsque cette place était assiégée par le prince Eugène, c'est un. crime que les bons Français doivent au moins réprimer, et une calomnie ridicule qu'un historiographe de France serait coupable de ne pas réfuter.

Et sur quoi fonde-t-il cette noire imposture? Voici ses paroles : « Le roi entra chez M'»^ de Maintenon, et, dans le premier mou- vement de sa joie, lui dit : «Vos prières sont exaucées, madame; « Vendôme tient mes ennemis, Lille sera délivrée, et vous serez « reine deFrance. » Ces paroles furent entendues et répétées ; Monseigneur les sut : il trembla pour la gloire de la famille

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