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324 HOMÉLIE

nitence. L'athée fourbe, ingrat, calomniateur, brigand, sangui- naire, raisonne et agit conséquemment, s'il est sûr de l'impunité de la part des hommes. Car, s'il n'y a point de Dieu, ce monstre est son Dieu à lui-même; il s'immole tout ce qu'il désire, ou tout ce qui lui fait obstacle. Les prières les plus tendres, les meilleurs raisonnements, ne peuvent pas plus sur lui que sur un loup aflfamé de carnage.

Lorsque le pape Sixte IV faisait assassiner les deux Médicis dans l'église de la Reparade S au moment où l'on élevait aux yeux du peuple le Dieu que ce peuple adorait. Sixte IV, tranquille dans son palais, n'avait rien à craindre, soit que la conjuration réussît, soit qu'elle échouât ; il était sûr que les Florentins n'oseraient se venger, qu'il les excommunierait en pleine liberté, et qu'ils lui demanderaient pardon à genoux d'avoir osé se plaindre.

n est très-vraisemblable que l'athéisme a été la philosophie de tous les hommes puissants qui ont passé leur vie dans ce cercle de crimes que les imbéciles appellent politique, coup d'État, art de gouverner.

On ne me persuadera jamais qu'un cardinal 2, ministre célè- bre, crût agir en la présence de Dieu lorsqu'il faisait condamner à mort un des grands de l'État par douze meurtriers en robe, esclaves à ses gages, dans sa propre maison de campagne, et pen- dant qu'il se plongeait dans la dissolution avec ses courtisanes, à côté de l'appartement où ses valets, décorés du nom de juges, menaçaient de la torture un maréchal de France dont il savourait

déjà la mort.

Quelques-uns de vous, mes frères, m'ont demandé si un prince juif =* avait une véritable notion de la Divinité quand, à l'article de la mort, au heu de demander pardon à Dieu de ses adultères, de ses homicides, de ses cruautés sans nombre, il persiste d'ans la soif du sang, et dans la fureur atroce des ven- o-eances; quand, d'une bouche prête à se fermer pour jamais, il recommande à son successeur de faire assassiner le vieillard Sémeï son ministre\ et son général Joab?

J'avoue avec vous que cette action, dont saint Ambroise voulut en vain faire l'apologie, est la plus horrible peut-être qu'on puisse lire dans les annales des nations. Le moment de la mort

1 Voyez tome XII, page 16.8.

2. Richelieu; voyez, tome XIII, pages li et suiv., l'histoire du procès du maré- 'Chal de JVlarillac.

3. David.

4. m. Rois, II, 5, 8.

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