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LETTRE DE MILORD CORNSBURY.


des choses qu’il faut renvoyer avec milord Pierre à l’auteur du Conte du Tonneau, et qu’un esprit de votre trempe n’examinera jamais sérieusement. Vous êtes né, milord, pour des choses plus utiles, pour servir votre patrie, et pour mépriser ces rêveries scolastiques, etc.


LETTRE DE MILORD CORNSBURY
À MILORD BOLINGBROKE.

Personne n’a jamais mieux développé que vous, milord, l’établissement et les progrès de la secte chrétienne. Elle ressemble dans son origine à nos quakers. Le platonisme vint bientôt après mêler sa métaphysique chimérique et imposante au fanatisme des galiléens. Enfin le pontife de Rome imita le despotisme des califes. Je crois que, depuis notre révolution, l’Angleterre est le pays où le christianisme fait le moins de mal. La raison en est que ce torrent est divisé chez nous en dix ou douze ruisseaux, soit presbytériens, soit autres dissenters, sans quoi il nous aurait peut-être submergés.

C’est un mal que nos évêques siégent en parlement comme barons ; ce n’était pas là leur place. Rien n’est plus directement contraire à l’institut primitif. Mais quand je vois des évêques et des moines souverains en Allemagne, et un vieux godenot à Rome sur le trône des Trajan et des Antonins, je pardonne à nos sauvages ancêtres qui laissèrent nos évêques usurper des baronnies.

Il est certain que notre Église anglicane est moins superstitieuse et moins absurde que la romaine. J’entends que nos charlatans ne nous empoisonnent qu’avec cinq ou six drogues, au lieu que les montebanks[1] papistes empoisonnent avec une vingtaine.

Ce fut un grand trait de sagesse dans le feu czar Pierre Ier, d’abolir dans ses vastes États la dignité de patriarche. Mais il était le maître ; les princes catholiques ne le sont pas de détruire l’idole du pape. L’empereur ne pourrait s’emparer de Rome et reprendre son patrimoine sans exciter contre lui tous les souverains de l’Europe méridionale. Ces messieurs sont, comme le Dieu des chrétiens, fort jaloux.

La secte subsistera donc, et la mahométane aussi, pour faire contre-poids. Les dogmes de celle-ci sont bien moins extravagants. L’incarnation et la trinité sont d’une absurdité qui fait frémir.

  1. Mot anglais qui signifie saltimbanques.