ces trois sont un en Jésus. Aucun de ces passages, tous différents les uns des autres, ne se trouve dans les anciens manuscrits ; aucun des Pères des trois premiers siècles ne les cite ; et d’ailleurs quel fruit en pourraient recueillir ceux qui admettent ces falsifications ? comment pourront-ils entendre que l’esprit, l’eau, et le sang, font la Trinité, et ne sont qu’un ? est-ce parce qu’il est dit[1] que Jésus sua sang et eau, et qu’il rendit l’esprit ? Quel rapport de ces trois choses à un Dieu en trois hypostases ?
La trinité de Platon était d’une autre espèce ; on ne la connaît guère : la voici telle qu’on peut la découvrir dans son Timée. Le Demiourgos éternel est la première cause de tout ce qui existe ; son idée archétype est la seconde ; l’âme universelle, qui est son ouvrage, est la troisième. Il y a quelque sens dans cette opinion de Platon. Dieu conçoit l’idée du monde. Dieu le fait. Dieu l’anime ; mais jamais Platon n’a été assez fou pour dire que cela composait trois personnes en Dieu. Origène était platonicien ; il prit ce qu’il put de Platon, il fit une trinité à sa mode. Ce système resta si obscur dans les premiers siècles que Lactance, du temps de l’empereur Constantin, parlant au nom de tous les chrétiens, expliquant la créance de l’Église, et s’adressant à l’empereur même, ne dit pas un mot de la Trinité ; au contraire, voici comme il parle, au chapitre XXIX du livre IV de ses Institutions : « Peut-être quelqu’un me demandera comment nous adorons un seul Dieu, quand nous assurons qu’il y en a deux, le Père et le Fils ; mais nous ne les distinguons point parce que le Père ne peut pas être sans son Fils, et le Fils sans son Père. »
Le Saint-Esprit fut entièrement oublié par Lactance, et quelques années après on n’en fit qu’une commémoration fort légère, et par manière d’acquit, au concile de Nicée : car après avoir fait la déclaration aussi solennelle qu’inintelligible de ce dogme son ouvrage, que le Fils est consubstantiel au Père, le concile se contente de dire simplement : Nous croyons aussi au Saint-Esprit[2].
- ↑ Luc, XXII, 44.
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Quelle malheureuse équivoque que ce Saint-Esprit, cet agion pneuma, dont ces christicoles ont fait un troisième Dieu ! ce mot ne signifiait que souffle. Vous trouverez dans l’Évangile attribué à Jean, chapitre XX, v. 22 : « Quand il dit ces choses, il souffla sur eux, et leur dit : Recevez le Saint-Esprit. »
Remarquez que c’était une ancienne cérémonie des magiciens, de souffler dans la bouche de ceux qu’ils voulaient ensorceler. Voilà donc l’origine du troi-
qui viendraient dans la salle de Westminster réclamer le bien d’un homme mort dans le pays de Galles, et qui ne voudraient pas montrer son testament ? (Note de Voltaire, 1771.) — C’est ci-dessus, page 247, et tome XIX, page 42, que Voltaire avait fait la remarque dont il parle au commencement du dernier alinéa.