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DES MŒURS DES JUIFS.


prophéties, demanda dans quel b…. on avait fait l’Écriture sainte[1].

On lit rarement les prophéties ; il est difficile de soutenir la lecture de ces longs et énormes galimatias. Les gens du monde, qui ont lu Gulliver et l’Atlantis, ne connaissent ni Osée ni Ézéchiel.

Quand on fait voir à des personnes sensées ces passages exécrables, noyés dans le fatras des prophéties, elles ne reviennent point de leur étonnement. Elles ne peuvent concevoir qu’un Isaïe[2] marche tout nu au milieu de Jérusalem, qu’un Ézéchiel[3] coupe sa barbe en trois portions, qu’un Jonas[4] soit trois jours dans le ventre d’une baleine, etc. Si elles lisaient ces extravagances et ces impuretés dans un des livres qu’on appelle profanes, elles jetteraient le livre avec horreur. C’est la Bible : elles demeurent confondues ; elles hésitent, elles condamnent ces abominations, et n’osent d’abord condamner le livre qui les contient. Ce n’est qu’avec le temps qu’elles osent faire usage de leur sens commun ; elles finissent enfin par détester ce que des fripons et des imbéciles leur ont fait adorer.

Quand ces livres sans raison et sans pudeur ont-ils été écrits ? Personne n’en sait rien. L’opinion la plus vraisemblable est que la plupart des livres attribués à Salomon, à Daniel, et à d’autres, ont été faits dans Alexandrie ; mais qu’importe, encore une fois, le temps et le lieu ? Ne suffit-il pas de voir avec évidence que ce sont des monuments de la folie la plus outrée et de la plus infâme débauche ?

Comment donc les Juifs ont-ils pu les vénérer ? C’est qu’ils étaient des Juifs. Il faut encore considérer que tous ces monuments d’extravagance ne se conservaient guère que chez les prêtres et les scribes. On sait combien les livres étaient rares dans tous les pays où l’imprimerie, inventée par les Chinois, ne parvint que si tard. Nous serons encore plus étonnés quand nous verrons les Pères de l’Église adopter ces rêveries dégoûtantes, ou les alléguer en preuve de leur secte.

Venons enfin de l’Ancien Testament au Nouveau. Venons à Jésus, et à l’établissement du christianisme ; et, pour y arriver, passons par-dessus les assassinats de tant de rois, et par-dessus les enfants jetés au milieu des flammes dans la vallée de Tophet,

  1. Voyez, dans la Bible enfin expliquée, une des notes sur le second livre des Rois.
  2. Isaïe, xx, 2.
  3. Ézéchiel, v, 2.
  4. Jonas, ii, 1.