hétérogène. Qu’ils crussent ou non que Téthys était la déesse de la mer, qu’ils fussent persuadés ou non de la guerre des géants et de l’âge d’or, de la boîte de Pandore et de la mort du serpent Python, etc., ces doctrines n’avaient rien de commun avec la morale. C’est une chose admirable dans l’antiquité que la théogonie n’ait jamais troublé la paix des nations.
Ah ! si nous pouvions imiter l’antiquité ! si nous faisions enfin à l’égard des disputes théologiques ce que nous avons fait au bout de dix-sept siècles dans les belles-lettres !
Nous sommes revenus au goût de la saine antiquité, après avoir été plongés dans la barbarie de nos écoles. Jamais les Romains ne furent assez absurdes pour imaginer qu’on pût persécuter un homme parce qu’il croyait le vide ou le plein, parce qu’il prétendait que les accidents ne peuvent pas subsister sans sujet, parce qu’il expliquait en un sens un passage d’un auteur, qu’un autre entendait dans un sens contraire.
Nous avons recours tous les jours à la jurisprudence des Romains ; et quand nous manquons de lois (ce qui nous arrive si souvent), nous allons consulter le Code et le Digeste. Pourquoi ne pas imiter nos maîtres dans leur sage tolérance ?
Qu’importe à l’État qu’on soit du sentiment des réaux ou des nominaux ; qu’on tienne pour Scot ou pour Thomas, pour Œcolampade ou pour Mélanchthon ; qu’on soit du parti d’un évêque d’Ypres[1] qu’on n’a point lu, ou d’un moine espagnol[2] qu’on a moins lu encore ? N’est-il pas clair que tout cela doit être aussi indifférent au véritable intérêt d’une nation que de traduire bien ou mal un passage de Lycophron ou d’Hésiode ?
Je sais que les hommes sont quelqufois malades du cerveau.
Nous avons eu un musicien[3] qui est mort fou parce que sa musique n’avait pas paru assez bonne. Des gens ont cru avoir un nez de verre ; mais s’il y en avait d’assez, attaqués pour penser,