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NOTICE SUR MAXIME DE MADAURE.

cultes à la vérité, mais qui s’accordent tous dans leur variété même, et ne tendent qu’à la même fin !


RÉPONSE D’AUGUSTIN.


Il y a dans votre place publique deux statues de Mars, nu dans l’une, et armé dans l’autre, et tout auprès la figure d’un homme qui, avec trois doigts qu’il avance vers Mars, tient en bride cette divinité dangereuse à toute la ville... Sur ce que vous me dites que de pareils dieux sont des membres du seul véritable Dieu, je vous avertis, avec toute la liberté que vous me donnez, de ne pas tomber dans de pareils sacriléges. Car ce seul Dieu dont vous parlez est sans doute celui qui est reconnu de tout le monde, et sur lequel les ignorants conviennent avec les savants, comme quelques anciens ont dit. Or direz-vous que celui dont la force, pour ne pas dire la cruauté, est réprimée par un homme mort, soit un membre de celui-là ? Il me serait aisé de vous pousser sur ce sujet, car vous voyez bien ce qu’on pourrait dire sur cela ; mais je me retiens, de peur que vous ne disiez que ce sont les armes de la rhétorique que j’emploie contre vous, plutôt que celles de la vérité.

Venons maintenant au fameux ouvrage de ce Maxime.


DIALOGUE.


Adélos.

Vos sages conseils, Sophronime, ne m’ont pas rassuré encore. Parvenu à l’âge de quatre-vingt-six années, vous croyez être plus près du terme que moi, qui en ai soixante et quinze ; vous avez rassemblé toutes vos forces pour combattre l’ennemi qui s’avance, mais je vous avoue que je n’ai pu me forcer à regarder la mort avec ces yeux indifférents dont on dit que tant de sages la contemplent.

Sophronime.

Il y a peut-être dans l’étalage de cette indifférence un faste de vertu qui ne convient pas au sage. Je ne veux point qu’on affecte de mépriser la mort ; je veux qu’on s’y résigne : nous le devons, puisque tout corps organisé, animaux pensants, animaux sentants, végétaux, métaux même, tout est formé pour la destruction. La grande loi est de savoir souffrir ce qui est inévitable.