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496 ÉCLAIRCISSEMENTS HISTORIQUES.

châteaux qu'il avait en Provence. Il alla à Valence, et fut mené nu en chemise devant la porte de l'église : et là il fut battu de verges comme un vil scélérat qu'on fouette parla main du hourreau; il ajouta à cette infamie celle de se joindre lui-même aux croisés contre ses propres sujets. On sait la suite de cette déplorable révolution ; on sait combien de villes furent mises en cendres, combien de familles expirèrent par le fer et par les flammes.

L'Histoire des Albigeois rapporte, au chapitre vi, que le clergé chantait Veni, sancte Spiritus, aux portes de Carcassonne, tandis qu'on égorgeait tous les habitants du faubourg, sans distinction de sexe ni d'âge ; et il se trouve aujourd'hui un Nonotte qui ose canoniser ces abominations, et qui imprime dans Avignon que c'est ainsi qu'il fallait traiter, au nom de Dieu, les princes et les peuples. Nonotte veut qu'on mette à feu et à sang tous les Lan- guedociens qui ne vont pas à la messe. Il est mitis corde^.

Après avoir frémi de tant d'horreurs, il est peut-être assez inutile d'examiner si les comtes de Foix, de Gominges et de Béarn, qui combattirent avec le roi d'Aragon pour le comte Raimond de Toulouse contre le sanguinaire Montfort, étaient des hérétiques; le iibelliste l'assure, mais apparemment qu'il en a eu quelque révélation. Est-on donc hérétique pour prendre les armes en faveur d'un prince opprimé ? Il est vrai qu'ils furent excommuniés, selon l'usage aussi absurde qu'horrible de ce temps-là ; mais qui a dit à ce Nonotte que ces seigneurs étaient des hérétiques ?

Qu'il dise tant qu'il voudra que Dieu fit un miracle en faveur du comte de Montfort : ce n'est pas dans ce siècle-ci qu'on croira que Dieu change le cours de la nature, et fait des miracles pour verser le sang humain.

��XVIP SOTTISE DE NONOTTE.

SL'R LES CHANGEMENTS lAITS DANS l'ÉGLISE.

Le Iibelliste s'imagine qu'on a manqué de respect à l'Église catholique en rapportant les diverses formes qu'elle a prises.

Peut-on ignorer que tous les usages de l'Église chrétienne ont changé depuis Jésus-Christ? La nécessité des temps, l'augmen- tation du troupeau, la prudence des pasteurs, ont introduit ou aboli des lois et des coutumes. Presque tous les usages des églises grecque et latine diiïèreut. D'abord il n'y eut point de temples,

1. Malt hic II, XI, 20.

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