LETTRE DE PARIS
Voici ce qui vient d’arriver au sujet du marquisat de Pompignan. On a porté à M. le garde des sceaux les lettres patentes à sceller ; il les a lues, et il a trouvé
Que le roi désirant reconnaître les services importants que la maison de Lefranc avait rendus à l’État, depuis la fondation de la monarchie, soit dans la robe, soit dans l’épée ; désirant récompenser personnellement les services que M. Lefranc avait rendus à sa patrie et à la religion, soit en qualité de magistrat, et à la tête d’une cour souveraine, soit en qualité d’homme de lettres, et nommément le soin qu’il a pris d’immortaliser la mémoire de M. le duc de Bourgogne par le bel éloge qu’il en a fait[2] ; Sa Majesté, en attendant mieux, avait jugé à propos d’ériger en marquisat sa terre de Pompignan, n’entendant néanmoins Sa Majesté que ce fût là une récompense, mais une faible marque de satisfaction, etc.
M. le garde des sceaux[3] a cru que la tête avait tourné au secrétaire du roi qui avait rédigé ces patentes ; il l’a envoyé chercher (ce secrétaire du roi est M. Carpot). M. de Brou lui a demandé s’il avait perdu l’esprit, disant que quand ce seraient les Montmorency, les Châtillon, les La Trimouille, il n’en eût pas mis davantage. « Il est vrai, monseigneur, lui a dit M. Carpot, que c’est moi qui ai dressé les lettres ; mais la formule m’en a été envoyée…
- ↑ Cette date peut fort bien ne pas être celle de la composition de cette Lettre : mais, dès le 2 mars, Voltaire, dans ses lettres à Thieriot et à Damilaville, parle de l’aventure du garde des sceaux, du secrétaire Carpot, et des lettres patentes. (B.)
- ↑ Lefranc de Pompignan est auteur d’un Éloge historique de Monseigneur le duc de Bourgogne (mort le 22 mars 1761). Paris, Imprimerie royale, 1761, in-8o.
- ↑ Paul-Esprit Feydeau de Brou, nommé garde des sceaux le 1er octobre 1762, se démit en octobre 1763. et mourut en 1767.