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LES QUAND,

notes utiles sur un discours prononcé devant l’académie française
le 10 mars 1760[1].



Quand on a l’honneur d’être reçu dans une compagnie respectable d’hommes de lettres, il ne faut pas que la harangue de réception soit une satire contre les gens de lettres : c’est insulter la compagnie et le public.

Quand par hasard on est riche, il ne faut pas avoir la basse cruauté de reprocher aux gens de lettres leur pauvreté dans un discours académique, et dire avec orgueil qu’ils déclament contre les richesses, et qu’ils portent envie en secret aux riches : 1o parce

  1. Jean-Jacques Lefranc, marquis de Pompignan (né en 1709, mort en 1784), ayant été élu membre de l’Académie française à la place de Maupertuis, prit séance le 10 mars 1760, et, dans son discours de réception, dit que l’abus des talents, le mépris de la religion, la haine de l’autorité, font le caractère dominant des productions de ses confrères ; que tout porte l’empreinte d’une littérature dépravée, d’une morale corrompue, et d’une philosophie altière qui sape également le trône et l’autel ; que les gens de lettres déclament tout haut contre les richesses, et qu’ils portent envie secrètement aux riches, etc.

    Ce fut l’origine des Quand, qui parurent en avril. La sixième édition, imprimée en rouge, est augmentée des Si et des Pourquoi, pièces dirigées aussi contre Lefranc, mais qui, étant de Morellet, ne doivent pas être admises dans les Œuvres de Voltaire.

    Lefranc de Pompignan, blessé surtout d’un passage des Quand, publia un mémoire, dont je parlerai plus loin (pages 135). De peur de faire une note plus ample que le texte, je ne donnerai pas la nomenclature de toutes les imitations ou parodies qu’ils firent naître ; mais je ne puis me dispenser d’indiquer : Les VII Quand, en manière des VIII de M. de V***, ou Lettre d’un apprenti bel esprit, qui ne manque pas de sens commun, à M. son père, en province, pour lui donner bonne opinion de lui, in-12 de onze pages ; Les Pourquoi, réponse aux ridicules Quand de M. le comte de Tornet, in-8o de quatre pages ; — Réponse aux Quand, aux Si, et aux Pourquoi, 1760, in-12 de vingt pages.

    On trouvera, ci-après, à l’année 1761, les Car et les Ah ! ah ! autres pièces de Voltaire contre Lefranc. C’est dans les Poésies (tome X) que j’ai placé les Pour, les Que, les Qui, les Quoi, les Oui, les Non, petites pièces rimées de Voltaire contre Lefranc, contre lequel sont aussi quelques écrits en prose des années 1763, 1764, 1765. (B.)