pour titre : Histoire des Amours de Grégoire VII, du cardinal de Richelieu, de la princesse de Condé, et de la marquise d’Urfé[1]. J’ai lu, il y a quelques années, les Amours du R. P. La Chaise, confesseur de Louis XIV.
VII. Une très-honorable dame[2], réfugiée à la Haye, composa, au commencement de ce siècle, six gros volumes de lettres d’une dame de qualité de province, et d’une dame de qualité de Paris, qui se mandaient familièrement les nouvelles du temps. Or, dans ces nouvelles du temps, je puis assurer qu’il n’y en a pas une de véritable. Toutes les prétendues aventures du chevalier de Bouillon, connu depuis sous le nom de prince d’Auvergne, y sont rapportées avec toutes leurs circonstances. J’eus la curiosité de demander un jour à M. le chevalier de Bouillon s’il y avait quelque fondement dans ce que Mme Dunoyer avait écrit sur son compte. Il me jura que tout était un tissu de faussetés. Cette dame avait ramassé les sottises du peuple, et dans les pays étrangers elles passaient pour l’histoire de la cour.
VIII. Quelquefois les auteurs de pareils ouvrages font plus de mal qu’ils ne pensent. Il y a quelques années qu’un homme de ma connaissance, ne sachant que faire, imprima un petit livre dans lequel il disait qu’une personne célèbre avait péri par le plus horrible des assassinats ; j’avais été témoin du contraire. Je représentai à l’auteur combien les lois divines et humaines l’obli-
- ↑ Mlle Durand, à qui l’on attribue cet ouvrage, remporta, en 1701, le prix de poésie à l’Académie française. (B.)
- ↑ La Dunoyer. (Note de Voltaire.) — On a de cette dame, morte en 1720, des Lettres historiques et galantes, et Mémoires, dont la première édition est de 1710, cinq volumes in-12, et la dernière, de 1757, neuf volumes petit in-12. Ce fut dans une des premières éditions qu’elle publia les lettres de Voltaire à sa fille, depuis Mme de Winterfeld ; voyez dans la Correspondance, années 1713-14, et la note sur la lettre à Moussinot, de septembre 1736.
la pureté et la chasteté par son testament politique ? lui qui avait eu publiquement tant de maîtresses, et qui, si l’on en croit les mémoires du cardinal de Retz et de tous les courtisans de ce temps-là, avait porté la témérité de ses désirs jusqu’à des objets qui devaient l’effrayer et le perdre.
Qu’on pèse toutes ces raisons, et qu’après on attribue ce livre, si on l’ose, au cardinal de Richelieu.
« On n’a pas été moins trompé, etc. »
Ce passage fut conservé dans la réimpression qui l’ait partie du tome IX, daté de 1750, des Œuvres de Voltaire, Dresde, 1748 et années suivantes, in-8°. Dans ces deux impressions il y avait en note les mots que voici : « Une partie de ces réflexions avait déjà paru dans les papiers publics. » Elles se trouvent en effet presque textuellement dans les Conseils à un journaliste (voyez tome XXII, page 241), et c’est sans doute ce qui porta Voltaire à les supprimer dans l’édition de 1751 de ses Œuvres, en onze volumes in-12. Mais Voltaire oubliait qu’il renvoyait à une des phrases qu’il retranchait (voyez page 445). (B.)