et si de ce vingtième on fait un fonds d’amortissement pour éteindre les capitaux des autres impôts établis pendant la guerre et pour rembourser les rentes. »
L’homme qui avait déjà battu notre contradicteur tira alors un petit papier de sa poche, et nous demanda à tous si nous savions ce que Louis XIV avait levé sur la nation pendant les soixante et douze années de son règne ?
Vous vous souvenez, monsieur, avec quelle sincérité nous répondîmes unanimement que nous n’en savions rien. « Eh bien, moi, je le sais, dit-il, par le moyen d’un citoyen très-éclairé et très-sage, qui, après avoir longtemps servi le roi dans ses armées en qualité d’officier, le sert actuellement dans ses finances. Il s’est donné la peine de faire cet immense calcul de toutes les impositions, ventes d’offices et droits de toute espèce, établis dans ce long et glorieux règne. En voici le résultat. Il monte à dix-huit milliards : ce qui compose, année commune, deux cents millions cinq cent mille livres, l’argent étant de vingt-sept à trente francs le marc. Or ces deux cents millions cinq cent mille livres, que Louis XIV retira chaque année, reviennent à trois cent trente millions de notre monnaie.
« Maintenant je demande si Louis XIV, malgré la faute qu’on fit de livrer tout aux traitants, a laissé son royaume moins riche, moins étendu, moins florissant, moins peuplé, moins puissant qu’il ne l’avait reçu de Louis XIII ? Les dettes de l’État se trouvèrent, à sa mort, monter à plus de deux milliards. C’est moins que ce que doit aujourd’hui l’Angleterre, qui n’a pas la moitié de l’argent comptant que nous possédons ; mais ces deux milliards, qui faisaient tant de bruit, à qui les devait-on ? une partie de la nation devait cet argent à l’autre. Cette dette énorme donna-t-elle à l’État de plus violentes secousses qu’il n’en reçut du système de Lass ? bouleversa-t-elle plus de fortunes ? et y a-t-il aujourd’hui un homme de bon sens qui ne convienne qu’il eût mieux valu continuer le dixième pour faire un fonds d’amortissement à la manière anglaise, en faisant d’ailleurs de justes réductions, que d’avoir recours aux dangereux et chimériques projets de Lass ? S’il fallait prendre un système étranger, c’était plutôt celui du ministère de Londres que celui d’un banquier de pharaon, fugitif de Londres. Maintenant, continua le même homme, vous savez, messieurs, ce que paye en temps de paix la Grande-Bretagne pour parvenir à éteindre ses dettes, et pour soutenir son fonds d’amortissement. Elle donne encore, outre les autres impôts, le dixième du revenu de ses terres. Elle vient récemment d’appliquer l’argent