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TROISIÈME PARTIE. — CHAPITRE IV.

La lune, dans son moyen mouvement, est éloignée du centre de la terre d’environ soixante rayons du globe de la terre : or, par les mesures prises en France, on connaît combien de pieds contient l’orbite que décrit la lune ; on sait par là que dans son moyen mouvement elle décrit 187,001 pieds de Paris en une minute.

La lune, dans son moyen mouvement, est tombée de A en B (figure 48) : elle a donc obéi à la force de projectile qui la pousse dans la tangente A C, et à la force qui la ferait descendre suivant la ligne A D, égale à B C ; ôtez la force qui la dirige de A en C, restera une force qui pourra être évaluée par la ligne C B : cette ligne C B est égale à la ligne A D ; mais il est démontré que la courbe A B, valant 187,961 pieds, la ligne A D ou C B en vaudra seulement quinze : donc, que la lune soit tombée en A ou en D, c’est ici la même chose, elle aurait parcouru 15 pieds en une minute de C en B ; donc elle aurait parcouru 15 pieds aussi de A en D en une minute. Mais, en parcourant cet espace en une minute, elle fait précisément 3,600 fois moins de chemin qu’un mobile n’en ferait ici sur la terre ; 3,600 est juste le carré de sa distance : donc la gravitation qui agit ainsi sur tous les corps agit aussi entre la terre et la lune précisément dans ce rapport de la raison inverse du carré des distances.

Mais si cette puissance qui anime les corps dirige la lune dans son orbite, elle doit aussi diriger la terre dans le sien, et l’effet qu’elle opère sur la planète de la lune, elle doit l’opérer sur la planète de la terre, car ce pouvoir est partout le même ; toutes les autres planètes doivent lui être soumises : le soleil doit aussi éprouver sa loi, et s’il n’y a aucun mouvement des planètes les unes à l’égard des autres qui ne soit l’effet nécessaire de cette puissance, il faut avouer alors que toute la nature la démontre. C’est ce que nous allons observer plus amplement[1].


CHAPITRE IV.
Que la gravitation et l’attraction dirigent toutes les planètes dans leurs cours. — Comment on doit entendre la théorie de la pesanteur chez Descartes. Ce que c’est que la force centrifuge, et la force centripète. Cette démonstration prouve que le soleil est le centre de l’univers, et non la terre. C’est pour les raisons précédentes que nous avons plus d’été que d’hiver.


Presque toute la théorie de la pesanteur, chez Descartes, est fondée sur cette loi de la nature que tout corps qui se meut en

  1. Ce chapitre est tel qu’on le ferait aujourd’hui. On n’a rien à y ajouter. (D.)