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DEUXIÈME PARTIE. — CHAPITRE XI.

soit en T, ce ne sont plus les mêmes rayons que vous voyez : la bande qui vous donnait du rouge vous donne alors de l’orangé, ou du vert ; ainsi du reste, et à chaque mouvement de tête vous voyez une iris nouvelle.

Ce premier arc-en-ciel bien conçu, vous aurez aisément l’intelligence du second, que l’on voit d’ordinaire qui embrasse ce premier, et qu’on appelle le faux arc-en-ciel parce que ses couleurs sont moins vives et qu’elles sont dans un ordre renversé.

Pour que vous puissiez voir deux arcs-en-ciel, il suffit que la nuée soit assez étendue et assez épaisse. Cet arc, qui se peint sur le premier et qui l’embrasse, est formé de même par des rayons que le soleil darde dans ces gouttes de pluie, qui s’y rompent, qui s’y réfléchissent de façon que chaque rangée de gouttes vous envoie aussi des rayons primitifs : cette goutte, un rayon rouge ; cette autre goutte, un rayon violet.

Mais tout se fait dans ce grand arc d’une manière opposée à ce qui se passe dans le petit. Pourquoi cela ? c’est que votre œil, qui reçoit les rayons efficaces du petit arc venu du soleil dans la partie supérieure des gouttes, reçoit au contraire les rayons du grand arc venus par la partie basse des gouttes.

Vous apercevez (figure 36) que les gouttes d’eau du petit arc reçoivent les rayons du soleil par la partie supérieure, par le haut de chaque goutte ; les gouttes du grand arc-en-ciel, au contraire, reçoivent les rayons qui parviennent par leur partie basse. Rien ne vous sera, je crois, plus facile que de concevoir comment les rayons se réfléchissent deux fois dans les gouttes de ce grand arc-en-ciel, et comment ces rayons, deux fois réfractés et deux fois réfléchis, vous donnent une iris dans un ordre opposé à la première, et plus affaiblie de couleur. Vous venez de voir que les rayons entrent ainsi dans la petite partie basse des gouttes d’eau de cette iris extérieure.

Une masse de rayons (figure 37) se présente à la surface de la goutte en G ; là une partie de ces rayons se réfracte en dedans, et une autre s’éparpille en dehors : voilà déjà une perte de rayons pour l’œil. La partie réfractée parvient en H, une moitié de cette partie s’échappe dans l’air en sortant de la goutte, et est encore perdue pour vous. Le peu qui s’est conservé dans la goutte s’en va en K ; là une partie s’échappe encore: troisième diminution. Ce qui en est resté en K s’en va en M, et à cette émergence en M une partie s’éparpille encore : quatrième diminution ; et ce qui en reste parvient enfin dans la ligne M N. Voilà donc dans cette goutte autant de réfractions que dans les gouttes du petit arc ;