Le P. Malebranche, qui, en examinant les erreurs des sens, ne fut pas exempt de celles que la subtilité du génie peut causer, adopta sans preuve les trois éléments de Descartes ; mais il changea beaucoup de choses à ce château enchanté, et, en faisant moins d’expériences encore que Descartes, il fit comme lui un système.
Des vibrations du corps lumineux impriment, selon lui, des secousses à de petits tourbillons mous, capables de compression, et tous composés de matière subtile. Mais si on avait demandé à Malebranche comment ces petits tourbillons mous auraient transmis à nos yeux la lumière, comment l’action du soleil pourrait passer en un instant à travers tant de petits corps comprimés les uns par les autres, et dont un très-petit nombre suffirait pour amortir cette action ; comment ces tourbillons mous ne seraient point mêlés en tournant les uns sur les autres ? comment ces tourbillons mous seraient élastiques ? enfin, pourquoi il supposait des tourbillons ? qu’aurait répondu le P. Malebranche ? sur quel fondement posait-il cet édifice imaginaire ? Faut-il que des hommes, qui ne parlaient que de vérité, n’aient jamais écrit que des romans !
Une expérience paraît détruire absolument tous ces prétendus tourbillons de matière lumineuse, qu’on suppose si gratuitement. Recevez la lumière du soleil sur un miroir concave ; opposez autant que vous le pourrez un verre lenticulaire à ce miroir concave, de façon que les deux pointes des deux cônes lumineux se joignent dans l’air : vous opérez par cet artifice la plus violente chaleur qu’il soit possible de former sur la terre. Si les pointes de ces cônes étaient des tourbillons tendants à s’échapper de tous côtés, comme on le prétend, n’est-il pas vrai qu’ils feraient au