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ÉPÎTRE DÉDICATOIRE.

Mais vous avez pris depuis un vol que je ne peux plus suivre. Je me trouve à présent dans le cas d’un grammairien qui aurait présenté un essai de rhétorique ou à Démosthène ou à Cicéron. J’offre de simples Éléments à celle qui a pénétré toutes les profon-

    Ici, en 1738, se trouvaient les deux derniers des trois alinéas qui, depuis 1741, composent l’Introduction de la deuxième partie.

    « On trouvera ici toutes celles qui conduisent à établir la nouvelle propriété de la matière découverte par Newton. On sera obligé de parler de quelques singularités qui se sont trouvées sur la route dans cette carrière ; mais on ne s’écartera point du but.

    « Ceux qui voudront s’instruire davantage liront les excellentes Physiques des S’Gravesande, des Keill, des Musschenbroek, des Pemberton, et s’approcheront de Newton par degrés. »

    C’est à la première phrase de cet Avant-propos de 1738 que fait allusion Mme du Châtelet, dans une lettre dont on a transcrit un passage, page 277.

    Dans l’édition de 1741, l’Avant-propos était conçu en ces termes :

    « Madame,

    La philosophie est de tout état et de tout sexe : elle est compatible avec la culture des belles-lettres, et même avec ce que l’imagination a de plus brillant, pourvu qu’on n’ait point permis à cette imagination de s’accoutumer à orner des faussetés, ni de trop voltiger sur la surface des objets.

    Elle s’accorde encore très-bien avec l’esprit d’affaires, pourvu que, dans les emplois de la vie civile, on se soit accoutumé à ramener les choses à des principes, et qu’on n’ait point trop appesanti son esprit dans les détails.

    Elle est certainement du ressort des femmes, lorsqu’elles ont su mêler aux amusements de leur sexe cette application constante qui est peut-être le don de l’esprit le plus rare.

    Qui jamais a mieux prouvé que vous, madame, cette vérité ? Qui a fait plus d’usage de son esprit et plus d’honneur aux sciences, sans négliger aucun des devoirs de la vie civile ? Votre exemple doit encourager ou faire rougir ceux qui donnent pour excuse de leur paresseuse ignorance ces vaines occupations qu’on appelle plaisirs ou devoirs de la société, et qui presque jamais ne sont ni l’un ni l’autre.

    Avant que je donne sous vos yeux une idée des découvertes de Newton en physique, comme je l’avais déjà essayé dans les éditions précédentes, permettez que je fasse d’abord connaître ce qu’il pensait en métaphysique ; non que je veuille seulement apprendre au public des vaines anecdotes dont il aime à repaitre sa curiosité sur ce qui regarde les hommes extraordinaires, mais parce que ses pensées sur ce qui est le moins à la portée des hommes leur peuvent encore être