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ET SUR SA PROPAGATION.

portion de feu qu’il contient dans sa propre substance ; ainsi, toutes choses égales, le corps qui contiendra le plus de soufre[1] sera le plus tôt dilaté, brûlé, et consumé.

Voilà pourquoi de tous les fluides connus l’alcool est celui qui se consume le plus vite[2].

HUITIÈME LOI.

Tous corps homogènes de dimensions égales, à feu égal, mais chacun peint ou teint d’une couleur différente, s’échauffent suivant les proportions des sept couleurs primitives. Le noir s’échauffe le plus vite, puis le violet, le pourpre, le vert, le jaune, l’orangé, le rouge, et enfin le blanc[3].

Par la même raison, le corps blanc garde plus longtemps sa chaleur, et le corps noir est celui qui la perd le plus tôt.

  1. On voit, par la lecture de toutes les pièces sur la nature du feu, envoyées à l’Académie en 1740, que la doctrine de Stahl sur le phlogistique était alors absolument inconnue en France. Le phlogistique, selon cet illustre chimiste, est un principe qui se retrouve le même dans tous les corps inflammables, qui est la cause de leur inflammabilité, ou plutôt la décomposition de ce principe produit le feu élémentaire, la lumière, dont l’action devient sensible dans le phénomène de l’inflammation. Stahl ne croyait pas en effet que le feu élémentaire, la lumière, se combinassent immédiatement avec l’acide vitriolique pour faire du soufre, avec une chaux métallique pour faire un métal ; il regardait la substance qui se combinait comme étant déjà le produit, l’effet d’une première combinaison, qui échappait aux moyens et aux observations de l’art.
    On a trouvé depuis que dans les phénomènes où Stahl n’avait vu que la combinaison du phlogistique, il y avait dégagement d’un fluide aériforme qu’on nomme air vital, air déphlogistiqué ; et que ces phénomènes, qu’il expliquait par le dégagement du phlogistique, étaient accompagnés d’une combinaison avec ce même fluide. Quelques chimistes en ont conclu que le phlogistique n’existait point dans les corps : cette assertion nous paraît hasardée ; en effet la lumière qui est produite par l’inflammation appartenait ou au corps enflammé, ou à cet air nécessaire pour que l’inflammation ait lieu ; dans le premier cas, il faut reconnaître un principe particulier dans le corps inflammable ; dans le second, il faut le reconnaître dans cet air vital ; mais l’air vital ne paraît point se décomposer dans plusieurs de ces opérations : il semble donc plus probable que le phlogistique, c’est-à-dire le principe auquel est due dans ces phénomènes l’apparition de la lumière, appartient aux corps inflammables, comme Stahl l’a imaginé.
    On pourrait, d’après plusieurs expériences, regarder le fluide aériforme, qu’on nomme air inflammable, et qui détone avec l’air vital, comme étant le principe de Stahl ; mais d’autres expériences paraissent prouver que la lumière seule peut se combiner avec les corps, puisque la lune cornée, étant exposée aux rayons du soleil, et dans un flacon bouché, se colore en violet. Il faudrait, il est vrai, examiner si cet effet se produit dans le vide, ou sans que l’air du flacon soit diminué ou changé de nature. (K.) — Voyez, ci-après, la note 3 de la page 321.
  2. Cette septième loi n’existe pas. (D.)
  3. Ce n’est pas la couleur qui différencie les corps sous ce rapport ; c’est une propriété spéciale. Il y a cependant quelque pressentiment de la vérité. (D.)