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RELIGION.

de là vient la vertu de ces noms quand on les arrange et qu’on les prononce selon les règles, etc. »

Origène en parlant ainsi ne donne point son sentiment particulier, il ne fait que rapporter l’opinion universelle. Toutes les religions alors connues admettaient une espèce de magie ; et on distinguait la magie céleste et la magie infernale, la nécromancie et la théurgie : tout était prodige, divination, oracle. Les Perses ne niaient point les miracles des Égyptiens, ni les Égyptiens ceux des Perses. Dieu permettait que les premiers chrétiens fussent persuadés des oracles attribués aux sibylles, et leur laissait encore quelques erreurs peu importantes, qui ne corrompaient point le fond de la religion.

Une chose encore fort remarquable, c’est que les chrétiens des deux premiers siècles avaient de l’horreur pour les temples, les autels et les simulacres. C’est ce qu’Origène avoue, n° 347. Tout changea depuis avec la discipline, quand l’Église reçut une forme constante.

QUATRIÈME QUESTION.

Lorsqu’une fois une religion est établie légalement dans un État, les tribunaux sont tous occupés à empêcher qu’on ne renouvelle la plupart des choses qu’on faisait dans cette religion avant qu’elle fût publiquement reçue. Les fondateurs s’assemblaient en secret malgré les magistrats ; on ne permet que les assemblées publiques sous les yeux de la loi, et toutes associations qui se dérobent à la loi sont défendues. L’ancienne maxime était qu’il vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes ; la maxime opposée est reçue, que c’est obéir à Dieu que de suivre les lois de l’État. On n’entendait parler que d’obsessions et de possessions, le diable était alors déchaîné sur la terre ; le diable ne sort plus aujourd’hui de sa demeure. Les prodiges, les prédictions, étaient alors nécessaires ; on ne les admet plus : un homme qui prédirait des calamités sur les places publiques serait mis aux petites-maisons. Les fondateurs recevaient secrètement l’argent des fidèles ; un homme qui recueillerait de l’argent pour en disposer, sans y être autorisé par la loi, serait repris de justice. Ainsi on ne se sert plus d’aucun des échafauds qui ont servi à bâtir l’édifice.

CINQUIÈME QUESTION.

Après notre sainte religion, qui sans doute est la seule bonne, quelle serait la moins mauvaise ?