Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome20.djvu/338

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
328
QUISQUIS. LANGLEVIEL.

cet horrible parricide fut commis en 1649. Ainsi donc il ne faut pas, selon Langleviel, détester Ravaillac, parce que le grand Henri IV fut assassiné en 1610.

«[1]Cromwell et Richelieu se ressemblent. » Cette ressemblance est difficile à trouver ; mais la folie atroce de l’auteur est aisée à reconnaître.

Il parle de MM. de Maurepas, Chauvelin, Machault, Berrier, en les nommant par leurs noms sans y mettre le monsieur, et il en parle avec un ton d’autorité qui fait rire.

Ensuite il fit le roman des Mémoires de madame de Maintenon, dans lequel il outrage les maisons de Noailles, de Richelieu, tous les ministres de Louis XIV, tous les généraux d’armée ; sacrifiant toujours la vérité à la fiction, pour l’amusement des lecteurs.

Ce qui paraît son chef-d’œuvre en ce genre, c’est sa réponse à un de nos écrivains[2], qui avait dit en parlant de la France :

« Je défie qu’on me montre aucune monarchie sur la terre dans laquelle les lois, la justice distributive, et les droits de l’humanité, aient été moins foulés aux pieds. »

Voici comme ce monsieur réfute cette assertion, qui est de la plus exacte vérité :

« Je ne puis relire ce passage sans indignation, quand je me rappelle toutes les injustices générales et particulières que commit le feu roi. Quoi ! Louis XIV était juste quand il ramenait tout à lui-même, quand il oubliait (et il l’oubliait sans cesse) que l’autorité n’était confiée à un seul que pour la félicité de tous ? Était-il juste quand il armait cent mille hommes[3] pour venger l’affront fait par un fou[4] à un de ses ambassadeurs ; quand, en 1667, il déclarait la guerre à l’Espagne pour agrandir ses États, malgré la légitimité d’une renonciation solennelle et libre[5] ; quand il envahissait la Hollande uniquement pour l’humilier ; quand il bombardait Gênes pour la punir de n’être pas son alliée[6] ; quand il

  1. Num. ccx. (Note de Voltaire.)
  2. Voltaire lui-même, à l’article 13 de son Supplément au Siècle de Louis XIV (tome XV). Voyez aussi l’article xi des Fragments sur l’histoire générale (Mélanges, année 1773).
  3. Où cet ignorant a-t-il vu que Louis XIV ait levé une armée de cent mille hommes en 1662, dans la querelle des ambassadeurs de France et d’Espagne à Londres ? (Note de Voltaire.)
  4. Où a-t-il pris que le baron de Batteville, ambassadeur d’Espagne, était fou ? (Id.)
  5. Où a-t-il pris qu’une renonciation d’une mineure est libre ? Il ignore d’ailleurs la loi de dévolution qui adjugeait la Flandre au roi de France. (Id.)
  6. Ce n’était pas pour la punir de n’être pas son alliée, mais d’avoir secouru ses ennemis étant son alliée. (Id.)