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PHILOSOPHE.

dans les animaux ? c’est Dieu. Qui fait la pensée dans l’homme ? c’est Dieu. »

On ne peut pas dire ici, Mentiris impudentissime, tu mens impudemment ; mais on doit dire : Tu blasphèmes la vérité impudemment.

Finissons par remarquer que le héros de l’ex-jésuite Paulian est l’ex-jésuite Patouillet, auteur d’un mandement d’évêque dans lequel tous les parlements du royaume sont insultés. Ce mandement fut brûlé par la main du bourreau. Il ne restait plus à cet ex-jésuite Paulian qu’à traiter l’ex-jésuite Nonotte de Père de l’Église, et à canoniser le jésuite Malagrida, le jésuite Guignard, le jésuite Carnet, le jésuite Oldcorn, et tous les jésuites à qui Dieu a fait la grâce d’être pendus ou écartelés : c’étaient tous de grands métaphysiciens, de grands philosopho-théologiens.

SECTION IV[1].

Les gens non pensants demandent souvent aux gens pensants à quoi a servi la philosophie. Les gens pensants leur répondront : À détruire en Angleterre la rage religieuse qui fit périr le roi Charles Ier sur un échafaud ; à mettre en Suède un archevêque dans l’impuissance de faire couler le sang de la noblesse, une bulle du pape à la main ; à maintenir dans l’Allemagne la paix de la religion, en rendant toutes les disputes théologiques ridicules : à éteindre enfin dans l’Espagne les abominables bûchers de l’Inquisition.

Welches, malheureux Welches, elle empêche que des temps orageux ne produisent une seconde Fronde et un second Damiens.

Prêtres de Rome, elle vous force à supprimer votre bulle In cœna Domini, ce monument d’impudence et de folie.

Peuples, elle adoucit vos mœurs. Rois, elle vous instruit.

SECTION V[2].

Le philosophe est l’amateur de la sagesse et de la vérité : être sage, c’est éviter les fous et les méchants. Le philosophe ne doit donc vivre qu’avec des philosophes.

Je suppose qu’il y ait quelques sages parmi les juifs : si l’un de ces sages mange avec quelques rabbins, s’il se fait servir un

  1. Voyez la note 1 de la page 200.
  2. Nouveaux Mélanges, troisième partie, 1765. (B.)