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ORAISON.

dans une fausse religion, ou à mesure qu’elle s’établit, parce qu’elle n’en a plus besoin, ou à mesure qu’elle s’affaiblit, parce qu’ils n’obtiennent plus de croyance. Le désir si vif et si inutile de connaître l’avenir donna naissance aux oracles ; l’imposture les accrédita, et le fanatisme y mit le sceau : car un moyen infaillible de faire des fanatiques, c’est de persuader avant que d’instruire. La pauvreté des peuples qui n’avaient plus rien à donner, la fourberie découverte dans plusieurs oracles, et conclue dans les autres, enfin les édits des empereurs chrétiens, voilà les causes véritables de l’établissement et de la cessation de ce genre d’imposture : des circonstances contraires l’ont fait disparaître ; ainsi les oracles ont été soumis à la vicissitude des choses humaines.

On se retranche à dire que la naissance de Jésus-Christ est la première époque de leur cessation ; mais pourquoi certains démons ont-ils fui tandis que les autres restaient ? D’ailleurs l’histoire ancienne prouve invinciblement que plusieurs oracles avaient été détruits avant cette naissance ; tous les oracles brillants de la Grèce n’existaient plus, ou presque plus, et quelquefois l’oracle se trouvait interrompu par le silence d’un honnête prêtre qui ne voulait pas tromper le peuple. L’oracle de Delphes, dit Lucain, est demeuré muet depuis que les princes craignent l’avenir ; ils ont défendu aux dieux de parler, et les dieux ont obéi.



ORAISON, PRIÈRE PUBLIQUE, ACTION DE GRÂCES[1], etc.


Il reste très-peu de formules de prières publiques des peuples anciens.

Nous n’avons que la belle hymne d’Horace pour les jeux séculaires des anciens Romains. Cette prière est du rhythme et de la mesure que les autres Romains ont imités longtemps après dans l’hymne Ut queant laxis resonare fibris.

Le Pervigilium Veneris est dans un goût recherché, et n’est pas peut-être digne de la noble simplicité du règne d’Auguste. Il se peut que cette hymne à Vénus ait été chantée dans les fêtes de la déesse ; mais on ne doute pas qu’on n’ait chanté le poëme d’Horace avec la plus grande solennité.

Il faut avouer que le poëme séculaire d’Horace est un des plus

  1. Questions sur l’Encyclopédie, huitième partie. 1771. (B.)