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OPINION.

tion, et souvent une mort prématurée. Il y en a des exemples qui font frémir.

M. Tissot a trouvé par l’expérience que le quinquina était le meilleur remède contre ces maladies, pourvu qu’on se défît absolument de cette habitude honteuse et funeste, si commune aux écoliers, aux pages, et aux jeunes moines.

Mais il s’est aperçu qu’il était plus aisé de prendre du quinquina que de vaincre ce qui est devenu une seconde nature.

Joignez les suites de l’onanisme avec la vérole, et vous verrez combien l’espèce humaine est ridicule et malheureuse.

Pour consoler cette espèce, M. Tissot rapporte autant d’exemples de malades de réplétion que de malades d’émission ; et ces exemples, il les trouve chez les femmes comme chez les hommes. Il n’y a point de plus fort argument contre les vœux téméraires de chasteté. Que voulez-vous en effet que devienne une liqueur précieuse formée par la nature pour la propagation du genre ; humain ? Si on la prodigue indiscrètement, elle peut vous tuer ; si on la retient, elle peut vous tuer de même. On a observé que les pollutions nocturnes sont fréquentes chez les personnes des deux sexes non mariées, mais beaucoup plus chez les jeunes religieux que chez les recluses, parce que le tempérament des hommes est plus dominant. On en a conclu que c’est une énorme folie de se condamner soi-même à ces turpitudes, et que c’est une espèce de sacrilége dans les gens sains de prostituer ainsi le don du Créateur, et de renoncer au mariage, ordonné expressément par Dieu même. C’est ainsi que pensent les protestants, les juifs, les musulmans, et tant d’autres peuples ; mais les catholiques ont d’autres raisons en faveur des couvents. Je dirai des catholiques ce que le profond Calmet dit du Saint-Esprit : ils ont eu sans doute de bonnes raisons.



OPINION[1].


Quelle est l’opinion de toutes les nations du nord de l’Amérique, et de celles qui bordent le détroit de la Sonde, sur le meilleur des gouvernements, sur la meilleure des religions, sur le droit public ecclésiastique, sur la manière d’écrire l’histoire, sur la nature de la tragédie, de la comédie, de l’opéra, de l’églogue, du poëme épique, sur les idées innées, la grâce concomitante et

  1. Questions sur l’Encyclopédie, huitième partie, 1771. (B.)