Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome20.djvu/134

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
124
NOËL.

ni quand cette coutume commença, ni quelle en fut la véritable raison.

L’opinion et la pratique des Occidentaux furent toutes différentes de celles de l’Orient. Les Centuriateurs de Magdebourg[1] rapportent un passage de Théophile de Césarée, qui fait parler ainsi les Églises des Gaules : Comme on célèbre la naissance de Jésus-Christ le 25 décembre, quelque jour de la semaine que tombe ce 25, on doit célébrer de même la résurrection de Jésus-Christ le 25 mars, quelque jour que ce soit, parce que le Seigneur est ressuscité ce jour-là.

Si le fait est vrai, il faut avouer que les évêques des Gaules étaient bien prudents et bien raisonnables. Persuadés, comme toute l’antiquité, que Jésus avait été crucifié le 23 mars, et qu’il était ressuscité le 26, ils faisaient la pâque de sa mort le 23, et celle de sa résurrection le 25, sans se mettre en peine d’observer la pleine lune, ce qui était au fond une cérémonie judaïque, et sans s’astreindre au dimanche. Si l’Église les avait imités, elle eût évité les disputes longues et scandaleuses qui pensèrent diviser l’Orient et l’Occident, et qui, après avoir duré un siècle et demi, ne furent terminées que par le premier concile de Nicée.

Quelques savants conjecturent que les Romains choisirent le solstice d’hiver pour y mettre la naissance de Jésus, parce que c’est alors que le soleil commence à se rapprocher de notre hémisphère. Dès le temps de Jules César, le solstice civil politique fut fixé au 25 décembre. C’était à Rome une fête où l’on célébrait le retour du soleil : ce jour s’appelait bruma, comme le remarque Pline[2], qui le fixe, ainsi que Servius[3], au 8 des kalendes de janvier. Il se peut que cette pensée eût quelque part au choix du jour ; mais elle n’en fut pas l’origine. Un passage de Josèphe, qui est évidemment faux, trois ou quatre erreurs des anciens, et une explication très-mystique d’un mot de saint Jean-Baptiste, en ont été la cause, comme Joseph Scaliger va nous l’apprendre.

Il plut aux anciens, dit ce savant critique[4], de supposer premièrement que Zacharie était souverain sacrificateur lorsque Jésus naquit. Rien n’est plus faux, et il n’y a plus personne qui le croie, au moins parmi ceux qui ont quelques connaissances.

Secondement, les anciens supposèrent ensuite que Zacharie

  1. Cent. 2, col. 118. (Note de Voltaire.)
  2. Histoire naturelle, livre XVIII, chapitre xxv. (Id.)
  3. Sur le vers 720 du septième livre de l’Énéide. (Id.)
  4. Can. Isagog., liv. III, page 305. (Id.)