« Mademoiselle, si vous ne me donnez votre parole d’honneur de ne jamais répéter cette plaisanterie, jamais Zaïre ne sera représentée ; il ne faudrait que faire circuler ce mot dans le parterre pour la faire tomber. » On peut imaginer que Mlle Quinault lui promit tout ce qu’il voulut. Mais ce qu’on aurait peine à croire, si l’on ne savait comment Voltaire était jugé aux premières représentations de ses pièces, c’est que le deuxième acte de Zaïre, la première fois qu’il fut joué, produisit peu d’effet, et même excita des murmures dans le parterre pendant qu’on pleurait dans les loges ; c’est du moins ce que l’auteur m’a dit plus d’une fois. Mais ce moment d’injustice fut très-court, et, dès la seconde représentation, la pièce fut aux nues. Ce n’est guère que le premier jour que les envieux et les mauvais plaisants cherchent à troubler l’impression du moment, et quand cette impression est aussi vive et aussi vraie que celle d’une tragédie telle que Zaïre, elle s’accroît sans cesse, et va bientôt aussi loin qu’elle doit aller. (Laharpe.)