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FANCHON.

Hélas ! que puis-je pour vous, moi qui suis si fort embarrassée pour moi-même ?

LA COMTESSE.

Tu peux m’aider,

FANCHON.

À quoi ? à vous venger de votre glorieux et impertinent mari ? oh ! de tout mon cœur.

LA COMTESSE.

Non, mais à m’en faire aimer.

FANCHON.

Il n’en vaut pas la peine, puisqu’il ne vous aime pas. Mais voilà malheureusement la raison pour quoi vous êtes si fort attachée à lui : s’il était à vos pieds, vous seriez peut-être indifférente.

LA COMTESSE.

Le cruel me traite avec tant de mépris !… Il en use avec moi comme si nous étions mariés de cinquante ans.

FANCHON.

C’est un air aisé : il prétend que ce sont les manières du grand monde. Le fat ! ah ! que vous êtes bonne, ma sœur, d’être honnête femme !

LA COMTESSE.

Prends pitié de ma sottise.

FANCHON.

Oui, mais à condition que vous prendrez part à ma folie.

LA COMTESSE.

Aide-moi à gagner le cœur de mon mari.

FANCHON.

Pourvu que vous me prêtiez quelques secours pour m’empêcher d’être l’esclave du corsaire qu’on me destine.

LA COMTESSE.

Viens, je te communiquerai mes desseins après souper.

FANCHON.

Et moi, je vous communiquerai mes petites idées… Voilà comme les sœurs devraient toujours vivre. Allons donc, ne pleurez plus, pour que je puisse rire.


FIN DU PREMIER ACTE.