L’auteur composa cette pièce à l’âge de dix-neuf ans[2]. Elle fut jouée, en 1718, quarante-cinq fois de suite. Ce fut le sieur Dufresne, célèbre acteur de l’âge de l’auteur, qui joua le rôle d’Œdipe ; la demoiselle Desmares, très-grande actrice, joua celui de Jocaste, et quitta le théâtre quelque temps après. On a rétabli dans cette édition le rôle de Philoctète tel qu’il fut joué à la première représentation.
La pièce fut imprimée pour la première fois en 1719. M. de Lamotte approuva la tragédie d’Œdipe. On trouve dans son approbation cette phrase remarquable : « Le public, à la représentation de cette pièce, s’est promis un digne successeur de Corneille et de Racine ; et je crois qu’à la lecture il ne rabattra rien de ses espérances. »
L’abbé de Chaulieu fit une mauvaise épigramme[3] contre cette approbation : il disait que l’on connaissait Lamotte pour un mauvais auteur, mais non pour un faux prophète. C’est ainsi que les grands hommes sont traités au commencement de leur carrière ; mais il ne faut pas que tous ceux que l’on traite de même s’imaginent pour cela être de grands hommes : la médiocrité insolente éprouve les mêmes obstacles que le génie ; et cela prouve seulement qu’il y a plusieurs manières de blesser l’amour-propre des hommes.
- ↑ Le premier alinéa formait tout l’Avertissement en 1738. Le reste parut pour la première fois dans les éditions de Kehl, et probablement est des rédacteurs de cette édition. (B.)
- ↑ Dans une note de son Commentaire historique sur sa vie, Voltaire parle d’une lettre écrite, en 1713, par Dacier, à l’auteur, qui avait déjà fait sa pièce. (B.)
- ↑ Voici cette épigramme :
Ô la belle approbation !
Qu’elle nous promet de merveilles !
C’est la sûre prédiction
De voir Voltaire un jour remplacer les Corneilles.
Mais où diable, Lamotte, as-tu pris cette erreur ?
Je te connaissais bien pour assez plat auteur,
Et surtout très-méchant poëte,
Mais non pour un lâche flatteur,
Encor moins pour un faux prophète.