Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu/195

Cette page n’a pas encore été corrigée

Et le mien n'est pas fait pour souffrir qu'on l'abuse.
Le roi revient enfin ; vous n'avez plus d'excuse :
Ne consultez ici que vos seuls intérêts,
Et ne me cachez plus vos sentiments secrets.
Parlez ; je ne crains point l'aveu d'une inconstance
Dont je mépriserais la vaine et faible offense ;
Je ne sais point descendre à des transports jaloux,
Ni rougir d'un affront dont la honte est pour vous.

SOHÊME.

Il faut donc m'expliquer, il faut donc vous apprendre
Ce que votre fierté ne craindra point d'entendre.
J'ai beaucoup, je l'avoue, à me plaindre du roi ;
Il a voulu, madame, étendre jusqu'à moi
Le pouvoir que César lui laisse en Palestine ;
En m'accordant sa soeur, il cherchait ma ruine :
Au rang de ses vassaux il osait me compter.
J'ai soutenu mes droits, il n'a pu l'emporter ;
J'ai trouvé, comme lui, des amis près d'Auguste ;
Je ne crains point Hérode, et l'empereur est juste ;
Mais je ne puis souffrir (je le dis hautement)
L'alliance d'un roi dont je suis mécontent.
D'ailleurs vous connaissez cette cour orageuse ;
Sa famille avec lui fut toujours malheureuse ;
De tout ce qui l'approche il craint des trahisons :
Son coeur de toutes parts est ouvert aux soupçons ;
Au frère de la reine il en coûta la vie ;
De plus d'un attentat cette mort fut suivie.
Mariamne a vécu, dans ce triste séjour,
Entre la barbarie et les transports d'amour,
Tantôt sous le couteau, tantôt idolâtrée,
Toujours baignant de pleurs une couche abhorrée ;
Craignant et son époux et de vils délateurs,
De leur malheureux roi lâches adulateurs.

SALOME.

Vous parlez beaucoup d'elle !

SOHÊME.

Ignorez-vous, princesse,
Que son sang est le mien, que son sort m'intéresse ?

SALOME.

Je ne l'ignore pas.

SOHÊME.

Apprenez encor plus :