Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome19.djvu/636

Cette page a été validée par deux contributeurs.
626
LOIS CRIMINELLES.

Qu’aucun prêtre ne puisse jamais ôter à un citoyen la moindre prérogative, sous prétexte que ce citoyen est pécheur, parce que le prêtre pécheur doit prier pour les pécheurs, et non les juger.

Que les magistrats, les laboureurs et les prêtres, payent également les charges de l’État, parce que tous appartiennent également à l’État.

Qu’il n’y ait qu’un poids, une mesure, une coutume.

Que les supplices des criminels soient utiles. Un homme pendu n’est bon à rien, et un homme condamné aux ouvrages publics sert encore la patrie et est une leçon vivante.

Que toute loi soit claire, uniforme, et précise : l’interpréter, c’est presque toujours la corrompre.

Que rien ne soit infâme que le vice.

Que les impôts ne soient jamais que proportionnels.

Que la loi ne soit jamais en contradiction avec l’usage : car si l’usage est bon, la loi ne vaut rien[1].


LOIS CRIMINELLES[2].


Il n’y a point d’année où quelques juges de provinces ne condamnent à une mort affreuse quelque père de famille innocent, et cela tranquillement, gaiement même, comme on égorge un dindon dans sa basse-cour. On a vu quelquefois la même chose à Paris.



  1. Voyez le poëme de la Loi naturelle. (Note de Voltaire.)
  2. Dans l’édition in-4o, 1774, des Questions sur l’Encyclopédie, la seconde section de l’article Lois était intitulée Lois criminelles, et se composait : 1o des quatre premiers alinéas de la Méprise d’Arras, opuscule publié trois ans auparavant (voyez les Mélanges, année 1771) ; 2o de l’alinéa ci-dessus ; 3o des alinéas 5, 9, 10, et autres de la Méprise d’Arras. (B.)