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JUIFS.

On n’entre point ici dans les détails de tous ces sacrifices, qui ne sont que des opérations de boucliers en cérémonie ; mais il est très-important de remarquer une autre sorte de sacrifice trop commune dans ces temps barbares. Il est expressément ordonné dans le xxviie chapitre du Lévitique d’immoler les hommes qu’on aura voués en anathème au Seigneur. « Point de rançon, dit le texte ; il faut que la victime promise expire. » Voilà la source de l’histoire de Jephté, soit que sa fille ait été réellement immolée, soit que cette histoire soit une copie de celle d’Iphigénie ; voilà la source du vœu de Saül, qui allait immoler son fils si l’armée, moins superstitieuse que lui, n’eût sauvé la vie à ce jeune homme innocent.

Il n’est donc que trop vrai que les Juifs, suivant leurs lois, sacrifiaient des victimes humaines. Cet acte de religion s’accorde avec leurs mœurs ; leurs propres livres les représentent égorgeant sans miséricorde tout ce qu’ils rencontrent, et réservant seulement les filles pour leur usage.

Il est très-difficile, et il devrait être peu important, de savoir en quel temps ces lois furent rédigées telles que nous les avons. Il suffit qu’elles soient d’une très-haute antiquité pour connaître combien les mœurs de cette antiquité étaient grossières et farouches.


SECTION III.
DE LA DISPERSION DES JUIFS.

On a prétendu que la dispersion de ce peuple avait été prédite comme une punition de ce qu’il refuserait de reconnaître Jésus-Christ pour le Messie, et l’on affectait d’oublier qu’il était déjà dispersé par toute la terre connue longtemps avant Jésus-Christ. Les livres qui nous restent de cette nation singulière ne font aucune mention du retour des dix tribus transportées au delà de l’Euphrate par Téglatphalasar et par Salmanasar son successeur ; et même environ six siècles après Cyrus, qui fit revenir à Jérusalem les tribus de Juda et de Benjamin, que Nabuchodonosor avait emmenées dans les provinces de son empire, les Actes des apôtres font foi que, cinquante-trois jours après la mort de Jésus-Christ, il y avait des Juifs de toutes les nations qui sont sous le ciel assemblés dans Jérusalem pour la fête de la Pentecôte. Saint Jacques écrit aux douze tribus dispersées, et Josèphe, ainsi que Philon, met des Juifs en grand nombre dans tout l’Orient.

Il est vrai que quand on pense au carnage qui s’en fit sous