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HORLOGE.



HORLOGE[1].
HORLOGE D’ACHAZ.

Il est assez connu que tout est prodige dans l’histoire des Juifs. Le miracle fait en faveur du roi Ézéchias sur son horloge, appelée l’horloge d’Achaz, est un des plus grands qui se soient jamais opérés. Il dut être aperçu de toute la terre, avoir dérangé à jamais tout le cours des astres, et particulièrement les moments des éclipses du soleil et de la lune ; il dut brouiller toutes les éphémérides. C’est pour la seconde fois que ce prodige arriva. Josué avait arrêté à midi le soleil sur Gabaon, et la lune sur Aïalon, pour avoir le temps de tuer une troupe d’Amorrhéens déjà écrasée par une pluie de pierres tombées du ciel.

Le soleil, au lieu de s’arrêter pour le roi Ézéchias, retourna en arrière, ce qui est à peu près la même aventure, mais différemment combinée.

D’abord Isaïe dit à Ézéchias qui était malade[2] : « Voici ce que dit le Seigneur Dieu : Mettez ordre à vos affaires, car vous mourrez, et alors vous ne vivrez plus. »

Ézéchias pleura. Dieu en fut attendri. Il lui fit dire par Isaïe qu’il vivrait encore quinze ans, et que dans trois jours il irait au temple. « Alors Isaïe se fit apporter un cataplasme de figues : on l’appliqua sur les ulcères du roi, et il fut guéri ; et curatus est. »

Ézéchias demanda un signe comme quoi il serait guéri. Isaïe lui dit : « Voulez-vous que l’ombre du soleil s’avance de dix degrés, ou qu’elle recule de dix degrés ? Ézéchias dit : Il est aisé que l’ombre avance de dix degrés, je veux qu’elle recule. Le prophète Isaïe invoqua le Seigneur, et il ramena l’ombre en arrière dans l’horloge d’Achaz, par les dix degrés par lesquels elle était déjà descendue. »

On demande ce que pouvait être cette horloge d’Achaz, si elle était de la façon d’un horloger nommé Achaz, ou si c’était un présent fait autrefois au roi du même nom. Ce n’est là qu’un objet de curiosité. On a disputé beaucoup sur cette horloge : les savants ont prouvé que les Juifs n’avaient jamais connu ni horloge ni gnomon avant leur captivité à Babylone, seul temps où ils apprirent quelque chose des Chaldéens, et où même le gros


  1. Questions sur l’Encyclopédie, neuvième partie, 1772. (B.)
  2. Rois, livre IV, chapitre xx. (Note de Voltaire.)