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GOUVERNEMENT.

lois, c’est ainsi qu’on les ferait pour sa sûreté. Pourquoi donc ne sont-elles pas suivies dans les autres pays ? N’est-ce pas demander pourquoi les cocos mûrissent aux Indes et ne réussissent point à Rome ? Vous répondez que ces cocos n’ont pas toujours mûri en Angleterre ; qu’ils n’y ont été cultivés que depuis peu de temps ; que la Suède en a élevé à son exemple pendant quelques années, et qu’ils n’ont pas réussi ; que vous pourriez faire venir de ces fruits dans d’autres provinces, par exemple en Bosnie, en Servie. Essayez donc d’en planter.

Et surtout, pauvre homme, si vous êtes bacha, effendi ou mollah, ne soyez pas assez imbécilement barbare pour resserrer les chaînes de votre nation. Songez que plus vous appesantirez le joug, plus vos enfants, qui ne seront pas tous bachas, seront esclaves. Quoi ! malheureux, pour le plaisir d’être tyran subalterne pendant quelques jours, vous exposez toute votre postérité à gémir dans les fers ! Oh, qu’il est aujourd’hui de distance entre un Anglais et un Bosniaque !


SECTION VII[1].
SECTION VIII[2].

Vous savez, mon cher lecteur, qu’en Espagne, vers les côtes de Malaga, on découvrit, du temps de Philippe II, une petite peuplade, jusqu’alors inconnue, cachée au milieu des montagnes de las Alpuxarras ; vous savez que cette chaîne de rochers inaccessibles est entrecoupée de vallées délicieuses ; vous n’ignorez pas que ces vallées sont cultivées encore aujourd’hui par des descendants des Maures, qu’on a forcés pour leur bonheur à être chrétiens, ou du moins à le paraître.

Parmi ces Maures, comme je vous le disais, il y avait sous Philippe II une nation peu nombreuse qui habitait une vallée à laquelle on ne pouvait parvenir que par des cavernes. Cette vallée est entre Pitos et Portugos ; les habitants de ce séjour ignoré étaient presque inconnus des Maures mêmes ; ils parlaient une langue qui n’était ni l’espagnole, ni l’arabe, et qu’on crut être dérivée de l’ancien carthaginois.

  1. Les éditeurs de Kehl avaient, sous le titre de section vii, donné la neuvième des Lettres philosophiques (voyez Mélanges, année 1734). (B.)
  2. Ce morceau a paru, en 1774, dans l’édition in-4o des Questions sur l’Encyclopédie. Il y formait la section vii. Dans les éditions précédentes l’article n’avait que six sections. (B.)