Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome18.djvu/419

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
409
DIVORCE.

et qu’il est impossible que l’Être infini, immense, éternel, ait été contenu dans un corps périssable.

Ils ont la confiance de citer en leur faveur Eusèbe, évêque de Césarée, qui, dans son Histoire ecclésiastique, livre I, chapitre xi, déclare qu’il est absurde que la nature non engendrée, immuable, du Dieu tout-puissant, prenne la forme d’un homme. Ils citent les Pères de l’Église Justin et Tertullien, qui ont dit la même chose : Justin, dans son Dialogue avec Tryphon, et Tertullien, dans son Discours contre Praxéas.

Ils citent saint Paul, qui n’appelle jamais Jésus-Christ Dieu, et qui l’appelle homme très-souvent. Ils poussent l’audace jusqu’au point d’affirmer que les chrétiens passèrent trois siècles entiers à former peu à peu l’apothéose de Jésus, et qu’ils n’élevaient cet étonnant édifice qu’à l’exemple des païens, qui avaient divinisé des mortels. D’abord, selon eux, on ne regarda Jésus que comme un homme inspiré de Dieu ; ensuite comme une créature plus parfaite que les autres. On lui donna quelque temps après une place au-dessus des anges, comme le dit saint Paul[1]. Chaque jour ajoutait à sa grandeur. Il devint une émanation de Dieu produite dans le temps. Ce ne fut pas assez : on le fit naître avant le temps même. Enfin on le fit Dieu consubstantiel à Dieu. Crellius, Voquelsius, Natalis Alexander, Hornebeck, ont appuyé tous ces blasphèmes par des arguments qui étonnent les sages et qui pervertissent les faibles. Ce fut surtout Fauste Socin qui répandit les semences de cette doctrine dans l’Europe ; et sur la fin du xvie siècle il s’en est peu fallu qu’il n’établît une nouvelle espèce de christianisme : il y en avait déjà eu plus de trois cents espèces.



DIVORCE.


SECTION PREMIÈRE[2].


Il est dit dans l’Encyclopédie, à l’article Divorce, que « l’usage du divorce ayant été porté dans les Gaules par les Romains, ce fut ainsi que Bissine ou Bazine quitta le roi de Thuringe, son mari, pour suivre Childéric, qui l’épousa ». C’est comme si on disait que les Troyens ayant établi le divorce à Sparte, Hélène

  1. Hebr., i, 4.
  2. Cette première section formait tout l’article dans les Questions sur l’Encyclopédie, quatrième partie, 1771. (B.)