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CONFESSION.

abolie sous l’empereur Théodose[1]. Une femme[2] s’étant accusée tout haut au pénitencier de Constantinople d’avoir couché avec le diacre, cette indiscrétion causa tant de scandale et de trouble dans toute la ville[3] que Nectarius permit à tous les fidèles de s’approcher de la sainte table sans confession, et de n’écouter que leur conscience pour communier. C’est pourquoi saint Jean Chrysostome, qui succéda à Nectarius, dit au peuple dans sa cinquième Homélie : « Confessez-vous continuellement à Dieu ; je ne vous produis pas sur un théâtre avec vos compagnons de service pour leur découvrir vos fautes. Montrez à Dieu vos blessures, et demandez-lui les remèdes ; avouez vos péchés à celui qui ne les reproche point devant les hommes. Vous les cèleriez en vain à celui qui connaît toutes choses, etc. »

On prétend que la confession auriculaire ne commença en Occident que vers le VIIe siècle, et qu’elle fut instituée par les abbés, qui exigèrent que leurs moines vinssent deux fois par an leur avouer toutes leurs fautes. Ce furent ces abbés qui inventèrent cette formule : « Je t’absous autant que je le peux et que tu en as besoin.» Il semble qu’il eût été plus respectueux pour l’Être suprême, et plus juste de dire : « Puisse-t-il pardonner à tes fautes et aux miennes ! »

Le bien que la confession a fait est d’avoir obtenu quelquefois des restitutions de petits voleurs. Le mal est d’avoir quelquefois, dans les troubles des États, forcé les pénitents à être rebelles et sanguinaires en conscience. Les prêtres guelfes refusaient l’absolution aux gibelins, et les prêtres gibelins se gardaient bien d’absoudre les guelfes[4].

  1. Socrate, livre V. Sozomène, livre VII. (Note de Voltaire.)
  2. Voltaire a raconté cela avec un peu plus de détails dans ses Éclaircissements historiques. Voyez les Mélanges, année 1763.
  3. En effet, comment cette indiscrétion aurait-elle causé un scandale public, si elle avait été secrète ? (Note de Voltaire.)
  4. Dans l’édition de 1765 l’article se terminait ainsi :

    « Les assassins des Sforces, des Médicis, des princes d’Orange, des rois de France, se préparèrent aux parricides par le sacrement de la confession.

    « Louis XI, la Brinvilliers se confessaient dès qu’ils avaient commis un grand crime, et se confessaient souvent, comme les gourmands prennent médecine pour avoir plus d’appétit.

    « Si on pouvait être étonné de quelque chose, on le serait d’une bulle du pape Grégoire XV, émanée de Sa Sainteté le 30 août 1622, par laquelle il ordonne de révéler les confessions en certain cas.

    « La réponse du jésuite Coton à Henri IV durera plus que l’ordre des jésuites. Révéleriez-vous la confession d’un homme résolu de m’assassiner ? — Non ; mais je me mettrais entre vous et lui. » (B.)