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CONCILES.

solaire de l’an 526, et Bède l’avait employée dans son Histoire ecclésiastique.

Au reste on ne sera point étonné que Constantin ait adopté le sentiment de ces trois cents ou trois cent dix-huit évêques qui tenaient pour la divinité de Jésus si l’on fait attention qu’Eusèbe de Nicomédie, un des principaux chefs du parti arien, avait été complice de la cruauté de Lucinius dans les massacres des évêques et dans la persécution des chrétiens. C’est l’empereur lui-même qui l’en accuse dans la lettre particulière qu’il écrivit à l’Église de Nicomédie. « Il a, dit-il, envoyé contre moi des espions pendant les troubles, et il ne lui manquait que de prendre les armes pour le tyran. J’en ai des preuves par les prêtres et les diacres de sa suite que j’ai pris. Pendant le concile de Nicée, avec quel empressement et quelle impudence a-t-il soutenu, contre le témoignage de sa conscience, l’erreur convaincue de tous côtés, tantôt en implorant ma protection, de peur qu’étant convaincu d’un si grand crime il ne fût privé de sa dignité ! Il m’a circonvenu et surpris honteusement, et a fait passer toutes choses comme il a voulu. Encore depuis peu, voyez ce qu’il a fait avec Théognis. »

Constantin veut parler de la fraude dont Eusèbe de Nicomédie et Théognis de Nicée usèrent en souscrivant. Dans le mot omousios ils insérèrent un iota qui faisait omoiousios, c’est-à-dire semblable en substance, au lieu que le premier signifie de même substance. On voit par là que ces évêques cédèrent à la crainte d’être déposés et bannis : car l’empereur avait menacé d’exil ceux qui ne voudraient pas souscrire. Aussi l’autre Eusèbe, évêque de Césarée, approuva le mot de consubstantiel, après l’avoir combattu le jour précédent.

Cependant Théonas de Marmarique et Second de Ptolémaïque demeurèrent opiniâtrement attachés à Arius : et le concile les ayant condamnés avec lui, Constantin les exila, et déclara, par un édit, qu’on punirait de mort quiconque serait convaincu d’avoir caché quelque écrit d’Arius au lieu de le brûler. Trois mois après, Eusèbe de Nicomédie et Théognis furent aussi envoyés en exil dans les Gaules. On dit qu’ayant gagné celui qui gardait les actes du concile par ordre de l’empereur, ils avaient effacé leurs souscriptions, et s’étaient mis à enseigner publiquement qu’il ne faut pas croire que le Fils soit consubstantiel au Père.

Heureusement, pour remplacer leurs signatures et conserver le nombre mystérieux de trois cent dix-huit, on imagina de