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ATHÉISME.

C’est une autre question, c’est celle du mal moral et du mal physique. Il y a longtemps qu’on demande pourquoi il y a tant de serpents et tant de méchants hommes pires que les serpents. Si les mouches pouvaient raisonner, elles se plaindraient à Dieu de l’existence des araignées ; mais elles avoueraient ce que Minerve avoua d’Arachné, dans la fable, qu’elle arrange merveilleusement sa toile.

Il faut donc absolument reconnaître une intelligence ineffable, que Spinosa même admettait. Il faut convenir qu’elle éclate dans le plus vil insecte comme dans les astres. Et à l’égard du mal moral et physique, que dire et que faire ? se consoler par la jouissance du bien physique et moral, en adorant l’Être éternel qui a fait l’un et permis l’autre.

Encore un mot sur cet article. L’athéisme est le vice de quelques gens d’esprit, et la superstition le vice des sots ; mais les fripons, que sont-ils ? des fripons.

Nous croyons ne pouvoir mieux faire que de transcrire ici une pièce de vers chrétiens faits à l’occasion d’un livre d’athéisme sous le nom des Trois Imposteurs, qu’un M. de Trawsmandorf prétendit avoir retrouvé[1].

SECTION III[2].
Des injustes accusations, et de la justification de Vanini.

Autrefois, quiconque avait un secret dans un art courait risque de passer pour un sorcier ; toute nouvelle secte était accusée d’égorger des enfants dans ses mystères ; et tout philosophe qui s’écartait du jargon de l’école était accusé d’athéisme par les fanatiques et par les fripons, et condamné par les sots.

Anaxagore ose-t-il prétendre que le soleil n’est point conduit

  1. Ici, dans la première édition des Questions sur l’Encyclopédie, 1770, se trouvait rapportée l’Epître à l’auteur du livre des Trois Imposteurs. Voyez tome X, page 402 (Épîtres, année 1769).
  2. En 1764, cette section et une grande partie de la suivante formaient un seul article, et tout l’article Athée dans le Dictionnaire philosophique. L’addition que je signalerai est de 1767, et alors était intitulée Seconde Section. Cette disposition fut conservée en 1769 dans la Raison par alphabet.

    En 1770, dans la seconde partie des Questions sur l’Encyclopédie, la troisième section de l’article Athéisme était la troisième section telle qu’elle est ici ; mais il y en avait une quatrième et dernière dans laquelle Voltaire répétait textuellement ce qu’il avait dit de Bonaventure Despériers, de Théophile, de Desbarreaux, de La Mothe le Vayer, de Saint-Évremond, de Fontenelle, de l’abbé de Saint-Pierre, de Barbeyrac, de Fréret et de Boulanger, dans la septième de ses Lettres à Son Altesse monseigneur le prince de *** (voyez les Mélanges, année 1767). (B.)