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ASTRONOMIE.

Ainsi le bélier, dans lequel le soleil entrait autrefois au commencement du printemps, est aujourd’hui à la place où était le taureau ; et tous les almanachs ont tort de continuer, par un respect ridicule pour l’antiquité, à placer l’entrée du soleil dans le bélier au premier jour du printemps.

Quand on commence à posséder quelques principes d’astronomie, on ne peut mieux faire que de lire les Institutions de M. Lemonnier, et tous les articles de M. d’Alembert dans l’Encyclopédie concernant cette science. Si on les rassemblait, ils feraient le traité le plus complet et le plus clair que nous ayons eu.

Ce que nous venons de dire du changement arrivé dans le ciel, et de l’entrée du soleil dans d’autres constellations que celles qu’il occupait autrefois, était le plus fort argument contre les prétendues règles de l’astrologie judiciaire. Il ne paraît pas cependant qu’on ait fait valoir cette preuve avant notre siècle pour détruire cette extravagance universelle, qui a si longtemps infecté le genre humain, et qui est encore fort en vogue dans la Perse.

Un homme né, selon l’almanach, quand le soleil était dans le signe du lion, devait être nécessairement courageux ; mais malheureusement il était né en effet sous le signe de la vierge ; ainsi il aurait fallu que Gauric et Michel Morin eussent changé toutes les règles de leur art.

Une chose assez plaisante, c’est que toutes les lois de l’astrologie étaient contraires à celles de l’astronomie. Les misérables charlatans de l’antiquité et leurs sots disciples, qui ont été si bien reçus et si bien payés chez tous les princes de l’Europe, ne parlaient que de Mars et de Vénus stationnaires et rétrogrades. Ceux qui avaient Mars stationnaire devaient être toujours vainqueurs ; Vénus stationnaire rendait tous les amants heureux ; si on était né quand Vénus était rétrograde, c’était ce qui pouvait arriver de pis. Mais le fait est que les astres n’ont jamais été ni rétrogrades ni stationnaires, et il suffirait d’une légère connaissance de l’optique pour le démontrer.

Comment donc s’est-il pu faire que, malgré la physique et la géométrie, cette ridicule chimère de l’astrologie ait dominé jusqu’à nos jours au point que nous avons vu des hommes distingués par leurs connaissances, et surtout très-profonds dans l’histoire, entêtés toute leur vie d’une erreur si méprisable ? Mais cette erreur était ancienne, et cela suffit.

Les Égyptiens, les Chaldéens, les Juifs, avaient prédit l’avenir : donc on peut aujourd’hui le prédire. On enchantait les serpents,