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APÔTRES.

IV.

Quelle était la discipline sous laquelle vivaient les apôtres
et les premiers disciples
 ?


Il paraît qu’ils étaient tous égaux. L’égalité était le grand principe des esséniens, des récabites, des thérapeutes, des disciples de Jean, et surtout de Jésus-Christ, qui la recommande plus d’une fois.

Saint Barnabé, qui n’était pas un des douze apôtres, donne sa voix avec eux. Saint Paul, qui était encore moins apôtre choisi du vivant de Jésus, non-seulement est égal à eux, mais il a une sorte d’ascendant ; il tance rudement saint Pierre.

On ne voit parmi eux aucun supérieur quand ils sont assemblés. Personne ne préside, pas même tour à tour. Ils ne s’appellent point d’abord évêques. Saint Pierre ne donne le nom d’évêque, ou l’épithète équivalente, qu’à Jésus-Christ, qu’il appelle le surveillant des âmes[1]. Ce nom de surveillant, d’évêque, est donné ensuite indifféremment aux anciens, que nous appelons prêtres ; mais nulle cérémonie, nulle dignité, nulle marque distinctive de prééminence.

Les anciens ou vieillards sont chargés de distribuer les aumônes. Les plus jeunes sont élus à la pluralité des voix[2], pour avoir soin des tables, et ils sont au nombre de sept : ce qui constate évidemment des repas de communauté[3].

De juridiction, de puissance, de commandement, de punition, on n’en voit pas la moindre trace.

Il est vrai qu’Ananias et Saphira sont mis à mort pour n’avoir pas donné tout leur argent à saint Pierre, pour en avoir retenu une petite partie dans la vue de subvenir à leurs besoins pressants ; pour ne l’avoir pas avoué ; pour avoir corrompu, par un petit mensonge, la sainteté de leurs largesses : mais ce n’est pas saint Pierre qui les condamne. Il est vrai qu’il devine la faute d’Ananias ; il la lui reproche; il lui dit[4] : « Vous avez menti au Saint-Esprit ; » et Ananias tombe mort. Ensuite Saphira vient, et Pierre au lieu de l’avertir l’interroge ; ce qui semble une action de juge.

  1. Épître I, chapitre ii, v. 25. (Note de Voltaire.)
  2. Actes, chapitre vi, v. 2. (Id.)
  3. Voyez l’article Église.
  4. Actes, chapitre v, v. 3. (Note de Voltaire.)