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APÔTRES.

n’a pas été le premier évêque, et la dispute subsistera autant que ces Églises.

Saint Jacques, ce premier évêque de Jérusalem, frère du Seigneur, continua toujours à observer la loi mosaïque. Il était récabite, ne se faisant jamais raser, marchant pieds nus, allant se prosterner dans le temple des Juifs deux fois par jour, et surnommé par les Juifs Oblia, qui signifie le Juste. Enfin ils s’en rapportèrent à lui pour savoir qui était Jésus-Christ[1] ; mais ayant répondu que Jésus était « le fils de l’homme assis à la droite de Dieu, et qu’il viendrait dans les nuées », il fut assommé à coups de bâton. C’est de saint Jacques le Mineur que nous venons de parler.

Saint Jacques le Majeur était son oncle, frère de saint Jean l’évangéliste, fils de Zébédée et de Salomé[2]. On prétend qu’Agrippa, roi des Juifs, lui fit couper la tête à Jérusalem.

Saint Jean resta dans l’Asie, et gouverna l’église d’Éphèse, où il fut, dit-on, enterré[3].

Saint André, frère de saint Pierre, quitta l’école de saint Jean-Baptiste pour celle de Jésus-Christ. On n’est pas d’accord s’il prêcha chez les Tartares, ou dans Argos ; mais, pour trancher la difficulté, on a dit que c’était dans l’Épire. Personne ne sait où il fut martyrisé, ni même s’il le fut. Les actes de son martyre sont plus que suspects aux savants ; les peintres l’ont toujours représenté sur une croix en sautoir, à laquelle on a donné son nom : c’est un usage qui a prévalu sans qu’on en connaisse la source.

Saint Pierre prêcha aux Juifs dispersés dans le Pont, la Bithynie, la Cappadoce, dans Antioche, à Babylone. Les Actes des apôtres ne parlent point de son voyage à Rome. Saint Paul même ne fait aucune mention de lui dans les lettres qu’il écrit de cette capitale. Saint Justin est le premier auteur accrédité qui ait parlé de ce voyage, sur lequel les savants ne s’accordent pas. Saint Irénée, après saint Justin, dit expressément que saint Pierre et saint Paul vinrent à Rome, et qu’ils donnèrent le gouvernement à saint Lin. C’est encore là une nouvelle difficulté. S’ils établirent saint Lin pour inspecteur de la société chrétienne naissante à Rome, on infère qu’ils ne la conduisirent pas, et qu’ils ne restèrent point dans cette ville.

La critique a jeté sur cette matière une foule d’incertitudes.

  1. Eusèbe, Épiphane, Jérôme, Clément d’Alexandrie. (Note de Voltaire.)
  2. Eusèbe, livre II, chapitre ix. (Id.)
  3. Eusèbe, livre III, chapitre xxx. (Id.)