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DICTIONNAIRE
PHILOSOPHIQUE




A[1].

Nous aurons peu de questions à faire sur cette première lettre de tous les alphabets. Cet article de l’Encyclopédie, plus nécessaire qu’on ne croirait, est de César Dumarsais, qui n’était bon grammairien que parce qu’il avait dans l’esprit une dialectique très profonde et très nette. La vraie philosophie tient à tout, excepté à la fortune. Ce sage, qui était pauvre et dont l’Éloge se trouve à la tête du septième volume[2] de l’Encyclopédie, fut persécuté par l’auteur de Marie à la Coque[3], qui était riche ; et sans les générosités du comte de Lauraguais, il serait mort dans la plus extrême misère. Saisissons cette occasion de dire que jamais la nation française ne s’est plus honorée que de nos jours par ces actions de véritable grandeur faites sans ostentation. Nous avons vu plus d’un ministre d’État encourager les talents dans l’indigence et demander le secret. Colbert les récompensait, mais avec l’argent de l’État, Fouquet avec celui de la déprédation. Ceux dont je parle[4] ont donné de leur propre bien ; et par là ils sont au-dessus de Fouquet, autant que par leur naissance, leurs dignités et leur génie. Comme nous ne les nommons point, ils ne doivent pas se fâcher. Que le lecteur pardonne cette digression qui commence notre ouvrage. Elle

  1. Cet article faisait partie des Questions sur l’Encyclopédie, première partie, 1770. (B.)
  2. Dans les Questions sur l’Encyclopédie, première édition et réimpression, il y a troisième volume. C’est une faute ; voyez la lettre de d’Alembert, du 11 mars 1770. (B.)
  3. Jean-Joseph Languet, évêque de Soissons, a donné, sous le titre de la Vie de la vénérable mère Marguerite-Marie, 1729, in-4°, l’histoire de Marie Alacoque. — C’est par faute ou par plaisanterie qu’on écrit Marie à la Coque, ainsi qu’a fait Voltaire. Alacoque est le nom de famille, et non le surnom. (B.)
  4. M. le duc de Choiseul. (K.)